lundi 11 mai 2015

Partis "Libérer le Tombeau du Seigneur", ils finirent par embrasser la Foi des "infidèles".



Partis "Libérer le Tombeau du Seigneur",

ils finirent par embrasser la Foi des "infidèles".


  On approchait la fin du XIme siècle. Des périodes de Vaches Maigres fustigeaient l'Occident d'une Famine devenue un mal endémique. Des "guenilleux" erraient affamés partout, et les belliqueux chevaliers ne finissaient de rompre la "Trêve de Dieu", prêchée en vain par l'église pour les empêcher de se battre entre eux en vue d'agrandir leurs fiefs.

On vivait alors en Europe, depuis Grégoire VII, le héros de Canossa, une ère de "césaropapisme", avec des Souverains Pontifes confondants les attributions de César avec celles du bon Dieu. Urbain Il remplissait alors les fonctions de Saint Père de la chrétienté occidentale en homme d'État à la hauteur de sa tâche. Franc, il se préoccupait tout particulièrement du sort de ses compatriotes. Il partit les sermonner chez eux à Clermont avec son célèbre Sermon du 27 novembre 1095. Pour sortir ses fils en Jésus Christ de leurs misères il eut une idée de génie : détourner l'orage en l'envoyant s'abattre sous d'autres cieux. Il résolvait ainsi deux problèmes terrestres : 1/. se débarrasser des affamés devant l'impossibilité de mettre fin à la Famine. 2/. se débarrasser en même temps de ses belliqueux et turbulents chevaliers sans peur et "sans reproche"(?) en les envoyant exercer leurs talents martiaux chez les Infidèles, ces ennemis de Dieu. Dans son Sermon historique de Clermont il alla franchement au but, sans détours, sans faux-fuyants :

"Vous pouvez dans ce pays à peine nourrir ses habitants, s'écrit-il. C'est pour cela que vous épuisez ses biens et provoquez des guerres sans fin entre vous-mêmes."

En d'autres mots : prenez la Croix, inscrivez sur votre bannière "En route vers la Libération du Tombeau du Seigneur", et le Seigneur vous aidera à résoudre vos problèmes aux frais d'autres peuples. Ce fut cela les "grands élans idéalistes" comme les appela Louis Bréhier (et bien d'autres...) dans un esprit de famille.

Riche matière à méditation que ces mots du Souverain Pontife. Ils exprimèrent toute l'Éthique de l'Occident des Croisades à nos jours, en passant par les conquistadores et les Pacificateurs des "peuples primitifs".

On nomma Godefroi de Bouillon grand chef de la Croisade, et Pierre l'Hermite se mit à la tête des "guenilleux", avec lesquels ne pouvaient se mélanger les chevaliers Francs. Au grand chef des "guenilleux" se joignirent des chevaliers Teutons, des "truands-sans-terres" tels que Emich von Leisingen, Walter Habenichtse, Gottschalk et Volkmar, dont l'apport en masses humaines dépassait en nombre de loin, de très loin même, celui apporté par Pierre L'Hermite, le Grand Chef des Damnés de la Terre d’alors, parce que grand démagogue.

L'"Armée" de Chtio Pierre, comme on appelait Pierre l'Hermite, se mit en route avant le départ des Vedettes de l'Expédition, les chevaliers Francs. Chemin faisant (et en l'absence de Pierrot parti en avance) sous la conduite des chevaliers Teutons, ils massacrèrent les Juifs de la Rhénanie pour les piller. Pour s'orienter vers l'Orient,
"sans guides, sans connaissance des routes, s'attendant à être conduits par des miracles; il y en avait qui suivaient une oie et une chèvre qu'ils croyaient remplis de l'esprit divin."

"Ils commirent de grands excès, et massacrèrent partout les Juifs sur leur passage, sous prétexte que leurs ancêtres avaient mis à mort Jésus Christ; ils étaient plus de deux cent mille Français et Allemands." (1)

En route vers Constantinople, première étape, ils vécurent de maraude. Ayant dépassé les bornes de l'hospitalité en Hongrie, ils se sont fait chasser du pays, et dispersés, ils n'arrivèrent plus qu'à 60.000 dans la capitale byzantine.

L'Empereur Comnène, effrayé de voir arriver d'abord cette cohorte de maraudeurs alors qu'il s'attendait à voir arriver :

"Ces chevaliers d'Occident dont il appréciait l'esprit belliqueux et le courage," (2)
les envoie à bord de ses navires s'installer à la forteresse de Civetot, aux environs de Nicée occupée par les Turcs (avec lesquels il était en armistice), en attendant qu'arrivent les grands chefs de la Croisade. Il les pourvut richement de vivres (Byzance était très riche) et leur recommanda sérieusement de s'abstenir d'aller marauder chez les Turcs. L'"Armée" de Pierre l'Hermite était malheureusement "composée en partie de pillards et de gens sans aveux" (3) et sans chefs pour les surveiller, puisque l'Hermite faisait de l'"hermitage" sur l'aristocratique Corne d'Or de Constantinople. Malgré la mise en garde des hommes de l'Empereur, les Français partirent faire une razzia en territoire turc aux environ de Nicée, et rentrèrent avec un grand troupeau de bétail.

Pris d'émulation, les Allemands voulurent faire mieux. Ils partirent attaquer un château au-delà de Nicée, le prirent d'assaut et en tirèrent un butin très riche. Cependant, les Turcs les assiégèrent avant qu'ils pussent s'en aller, et après huit jours de siège, les Allemands se rendirent à leurs assaillants. Ceux qui acceptèrent d'embrasser l'Islam furent épargnés; le peu qui voulut rester fidèle à sa Foi passa au fil de l'épée...

Après ce désastre des Allemands, les Français sortirent pour les venger. Ces pauvres bougres n'étaient pas vraiment des guerriers : ils tombèrent dans une embuscade. Ils tentèrent alors de fuir pour retourner à la forteresse de Civetot, mais les Turcs étaient à leurs talons. Ces derniers les rattrapèrent au galop avec leur fameuse cavalerie, et les massacrèrent par milliers. De tout le contingent de l'"Armée" de Pierre l'Hermite il ne restait plus que trois mille éclopés qui furent transportés par la marine byzantine à Constantinople pour rejoindre le Sieur Pierre l'Hermite.

Deux mots maintenant sur la qualité des "Croisés" que Pierre l'Hermite avait débauchés et finalement menés pour partie à la boucherie et pour partie à se convertir à l'Islam. Qui étaient ces pauvres hères? ces malheureux en guenilles? C'était des pauvres affamés auxquels on avait prêché Jérusalem, "la Ville où coule le lait et le miel". Des pauvres faméliques, des "ventres-creux" errant en Occident d'un Bourg à l'autre. Deux ans avant le Sermon du Saint Père pour la "Libération du Tombeau du Seigneur", il y avait eu la Peste et des inondations. L'année suivante, c'est à dire un an avant l'appel d'Urbain II, il y avait eu la sécheresse et une grande famine. Ce fut la Faim qui fut le Chef d'État Major de l'"Armée" de Pierre l'Hermite. Triste historiette, où la plupart des "Croisés" de l'aventurier Pierre l'Hermite, pour ne pas se laisser couper la tête subirent plutôt une opération que des mesures d'Hygiène des sémites élevèrent au rang d'un Culte.
 
BASILE Y.
Web : basile-y.com

1/.Henri Martin, HISTOIRE DE FRANCE, éd. Jouvet & Cie, Paris, tome I, page 166.
2/.Louis Bréhier, VIE ET MORT DE BYZANCE, Albin Michel 1969, page 254.
3/.Idem, page 255.
 
Mohamed ZEMIRLINE

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