L’Islam et l’esclavage
Par Muhammad Qutb
Dimanche 1er janvier 2006
Cette question controversée est sans doute la plus
vicieuse sur laquelle jouent les communistes pour ébranler les croyances
musulmanes chez les jeunes. Si l’Islam convenait à toutes les époques — comme
le prétendent ses prédicateurs —, alors il n’aurait pas permis
l’esclavage. Le fait qu’il ait permis l’esclavage constitue une preuve
catégorique que l’Islam est apparu pour une période limitée dans le temps,
qu’il a accompli son rôle et qu’il appartient désormais à l’histoire !
La jeunesse musulmane est elle-même habitée par des
doutes. Comment l’Islam a-t-il permis l’esclavage ? Comment cette
religion, indubitablement révélée par Dieu, indubitablement vraie,
indubitablement apparue pour le bonheur de l’humanité entière, toutes
générations confondues, a-t-elle permis l’esclavage ? Comment cette
religion, fondée sur l’égalité parfaite, renvoyant l’intégralité du genre
humain à une seule et même origine, et traitant tous les hommes sur un même pied
d’égalité, en vertu de leur origine commune, a-t-elle intégré l’esclavage dans
son système et légiféré à son sujet ? Dieu veut-Il que les hommes se
subdivisent pour l’éternité en deux catégories : les maîtres et les
esclaves ? Est-ce là Sa Volonté sur terre ? Dieu accepte-t-Il que le
genre humain qu’Il a honoré en déclarant « Certes, Nous avons honoré les
fils d’Adam » [1] devienne en partie une marchandise que l’on
vend et que l’on achète, à l’instar des esclaves ? Et si Dieu n’accepte
pas cela, pourquoi Son Noble Livre ne mentionne-t-il pas alors clairement
l’abolition de l’esclavage, comme il a mentionné la prohibition du vin, des
jeux de hasard, de l’usure et des autres péchés défendus par l’Islam ?
La jeunesse croyante sait pertinemment que l’Islam est
la religion de vérité, mais elle est à l’image d’Abraham auquel « Dieu
dit : «Ne crois-tu pas encore ?» «Si ! répond Abraham, mais pour
que mon coeur soit rassuré» [2].
La jeunesse dont la colonisation a corrompu l’esprit
et les croyances, quant à elle, ne prend pas le temps d’examiner la réalité des
choses. Dominée par ses passions, elle décide sans la moindre analyse critique
que l’Islam est un système périmé ayant épuisé toutes ses ressources.
Les communistes, pour leur part, se font les parangons
de foutaises « scientifiques » qu’ils reçoivent de leurs maîtres,
là-bas, et qui leur permettent de s’enfler d’orgueil, croyant avoir découvert
la vérité immuable et éternelle, au-dessus de laquelle nul doute ne saurait
planer [3]. C’est ce matérialisme dialectique, qui
divise l’existence humaine en grandes étapes économiques auxquelles il serait
impossible de se soustraire : le communisme primitif, l’esclavage, la
féodalité, le capitalisme et enfin, le communisme final, ultime étape avant la
fin du monde. L’ensemble des croyances, systèmes et doctrines qu’a connues
l’humanité ne seraient que le reflet de la situation ou de l’ère économiques à
laquelle ils sont apparus. Ils conviendraient ainsi à cette ère, et seraient
adaptés à sa conjoncture économique, mais ne sauraient convenir à l’étape suivante
qui s’appuie sur de nouveaux fondements économiques, en conséquence de quoi, il
n’existerait strictement aucun système capable de convenir à toutes les
générations humaines.
Si l’Islam est apparu alors que le monde était en
pleine transition entre l’ère esclavagiste et l’ère féodale, alors
nécessairement, ses lois, ses doctrines et ses systèmes étaient adaptés à cette
étape du développement historique : il reconnaît ainsi l’esclavage et
autorise la féodalité. L’Islam ne pouvait devancer le développement économique,
ni apporter un nouveau système dont les potentialités économiques n’étaient pas
encore prêtes. Mais pourquoi donc ?, serait-on tenté de demander. Parce
que Karl Marx a dit que c’était impossible.
À ce stade, nous aimerions replacer le problème dans
sa réalité historique, sociologique et psychologique, loin de la poussière que
veulent remuer les uns et les autres. Une fois que nous aurons abouti à une
vérité objective, il n’y aura plus lieu de se soucier des prétentions déviantes
ni des « savants » imposteurs !
Nous regardons aujourd’hui l’esclavage depuis le
prisme du XXe siècle. Nous le regardons à la lumière des atrocités
commises dans le monde de l’esclavagisme et des traitements barbares et
monstrueux que l’histoire nous a consignés sous l’Empire romain en particulier.
Nous regardons alors l’esclavage avec épouvante, et nos sentiments ne
parviennent à supporter l’idée que cette forme de traitement puisse être
légitimée ou entérinée par une religion ou un système quelconque. Ces réactions
de dégoût et de dénonciation s’emparent de nous et nous font nous
demander : Comment l’Islam a-t-il permis l’esclavage, alors que toutes ses
recommandations et toutes ses lois avaient pour but de libérer l’humanité de
toute servitude, quelle qu’en soit la forme ? Dans la chaleur de notre
réaction, nous souhaitons instamment que l’Islam ait reposé nos cœurs et nos
esprits de cette tourmente, en interdisant explicitement et sans détour
l’esclavage.
À
ce niveau, une halte historique s’impose...
L’histoire de l’Islam n’a jamais connu les atrocités
de l’esclavage romain dans le monde antique. Un simple coup d’œil sur la
situation des esclaves dans l’Empire romain suffit à mettre en exergue la
gigantesque avancée opérée par l’Islam au bénéfice des esclaves, et ce, même si
l’on suppose — à tort — qu’il n’a pas œuvré à leur libération !
Pour les Romains, les esclaves étaient des objets, non
des humains, des objets qui n’avaient strictement aucun droit, mais qui
croulaient sous le poids de leurs corvées. Mais avant tout, d’où provenaient
ces esclaves ? Ils provenaient des guerres, non pas de guerres menées au
nom d’une idée ou d’un principe, mais au nom de la volonté de soumettre et
d’exploiter les autres peuples pour la gloire de Rome. Afin que le Romain puisse
mener une vie de luxe et de faste, profitant de thermes frais ou chauds, se
pavanant dans de riches habits, goûtant à des mets aussi délicats que variés,
afin qu’il puisse s’immerger dans cette luxure obscène faite de vin, de femmes,
de danses, de fêtes et de festivals, il fallait nécessairement que d’autres
peuples soient asservis et que leur sang soit sucé. L’Égypte constitue à cet
égard un exemple édifiant, du temps où elle était une province romaine et avant
que l’Islam ne vienne la sauver du joug de la tyrannie : elle n’était en
effet qu’un grenier à blé et une source de revenus pour l’Empire.
C’est pour combler ces desseins pervers que
l’impérialisme romain et l’esclavage qui en a découlé ont existés. Comme nous
l’avons déjà évoqué, les esclaves étaient des objets privés du statut et des
droits des êtres humains. Ils travaillaient dans les champs, enchaînés de telle
sorte qu’ils ne puissent s’échapper. Ils étaient nourris, non pas parce que —
comme les animaux et les végétaux — ils avaient le droit de satisfaire leur
besoin de nourriture, mais parce qu’ils devaient rester en vie pour continuer à
travailler. Au cours de leur travail, ils étaient dirigés au fouet,
satisfaisant ainsi le sadisme pervers de leur maître ou de son représentant qui
prenaient plaisir à les torturer. Le soir, ils dormaient dans de sombres « cellules »
nauséabondes infestées d’insectes et de rats. Ils y étaient jetés par dizaines,
au point qu’ils pouvaient se retrouver entassés à cinquante dans la même
cellule, tous enchaînés, sans le moindre espace d’intimité tel celui qu’on
accorde aux vaches dans l’étable.
Mais l’horreur suprême était quelque chose d’encore
bien plus atroce, qui soulignait davantage la nature sauvage du Romain antique,
et que l’Européen moderne a hérité de lui dans les moyens de colonisation et
d’exploitation. Il s’agit des arènes de combat entre gladiateurs qui
s’entretuaient au glaive et à la lance. Ces festivals figuraient parmi les
préférés des Romains. Les maîtres, auxquels se joignait parfois l’Empereur, se rassemblaient
pour regarder les esclaves qui s’entredéchiraient au glaive et à la lance dans
des combats à mort. La joie des spectateurs atteignait alors son paroxysme, les
gosiers hurlant des ovations, les mains applaudissant de manière nourrie, avec
des rires de bonheur sincère et profond, dès lors que l’un des gladiateurs
terrasse son compère, et le laisse gisant, sans vie !
Telle était la situation des esclaves dans l’Empire
romain. Nous n’avons guère besoin de nous étendre sur le statut juridique des
esclaves d’alors, ni sur le droit incontestable du maître de tuer, de torturer
ou d’exploiter son esclave, sans que ce dernier n’ait le droit de s’en
plaindre, ni qu’il existe une partie susceptible d’examiner ou de reconnaître
cette plainte. Ce ne sont là que de futiles détails après tout ce que nous
venons de raconter.
Même si le traitement des esclaves en Perse, en Inde
ou dans d’autres contrées différait de ce qui se pratiquait dans l’Empire
romain en termes d’horreurs plus ou moins prononcées, il ne différait guère en
termes de bafouement total de la dignité humaine, et d’exploitation consistant
à faire porter aux esclaves les plus lourdes corvées, sans leur accorder de
compensation.
Puis
l’Islam est venu...
Il est venu rendre leur humanité à ces humains. Il est
venu dire aux maîtres au sujet de leurs esclaves : « Vous êtes les
uns des autres ». Il est venu déclarer : « Quiconque
tuera son esclave, nous le tuerons. Quiconque rasera son esclave, nous le
raserons. Quiconque émasculera son esclave, nous l’émasculerons » [4]. Il
est venu décréter l’unicité de l’origine, de la nature et du devenir de
l’humanité : « Vous êtes les enfants d’Adam, et Adam a été créé
d’argile ».
Il est venu établir qu’un maître n’a aucun mérite sur
son esclave, parce que l’un est maître et l’autre esclave. Le seul critère de
mérite est désormais la piété : « Un Arabe
n’a strictement aucun mérite sur un non-Arabe, pas plus qu’un non-Arabe n’en a
sur un Arabe, ni un Noir sur un Blanc, ni un Blanc sur un Noir, si ce n’est par
la piété » [5].
L’Islam est venu ordonner aux maîtres de bien traiter
leurs esclaves :
« Soyez bons envers vos père et
mère, vos proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin
lointain, le collègue et le voyageur, et les esclaves en votre possession, car
Dieu n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant. » [6]
Il est venu établir que la relation entre les maîtres
et les esclaves n’était pas une relation d’arrogance et d’asservissement, ni
une relation d’exploitation et d’humiliation, mais une relation familiale et
fraternelle. Les maîtres sont désormais la famille de la servante, si
bien que toute demande en mariage doit leur être adressée :
« Vous pouvez épouser une femme
parmi celles de vos esclaves croyantes. Dieu connaît mieux votre foi, car vous
êtes les uns des autres. Et épousez-les avec l’autorisation de leur famille et
faites-leur don d’une dot convenable » [7].
Les esclaves sont désormais les frères des
maîtres : « Vos esclaves sont vos frères.
Quiconque dispose de l’un de ses frères
doit le nourrir de ce dont il se nourrit lui-même et le vêtir de ce dont il se
vêt lui-même. Ne leur demandez pas ce qui dépasse leur capacité. Et si vous le
faîtes, alors aidez-les » [8].
Dans un souci supplémentaire de ménager les sentiments
des esclaves, le noble Messager — paix et bénédictions sur lui — ajoute : « Que nul d’entre vous ne dise : Voici mon
serviteur ou voici ma servante ! Mais qu’il dise : Mon garçon et ma
fille ! » Fort de cette sentence, Abû Hurayrah
interpela un homme qui était sur une monture tandis que son serviteur courait à
pied derrière lui : « Fais-le
monter derrière toi, car il est ton frère et son âme est comme la
tienne ! »
Ce n’était pas tout. Avant de passer à l’étape
suivante, nous devons en effet consigner le gigantesque saut opéré par l’Islam
envers les esclaves au cours de cette première étape.
Les esclaves n’étaient plus des objets. Ils sont
devenus des humains avec une âme identique à celle des maîtres. Les autres
nations considéraient alors sans exception que les esclaves étaient une race
différente de la race des maîtres et qu’ils avaient été créés pour être
asservis et humiliés. En conséquence, ces maîtres n’éprouvaient pas le moindre
scrupule à tuer les esclaves, à les torturer, à les brûler ou à les exploiter
dans les sales besognes et les travaux forcés. Partant de ce constat, l’Islam a
élevé les esclaves au statut de digne fraternité avec leurs maîtres, non pas
dans un monde idéalisé et utopique, mais dans le monde réel.
L’histoire — que nul n’a pu renier, pas même les plus
fanatiques auteurs européens — témoigne que le traitement des esclaves aux
premiers temps de l’Islam a atteint un niveau d’humanité tel qu’il n’a jamais
été atteint par ailleurs, au point que les esclaves affranchis refusaient de
quitter leurs anciens maîtres — alors qu’ils en étaient parfaitement capables
après s’être libérés financièrement et avoir pris l’habitude de se prendre en
charge eux-mêmes — parce qu’ils les considéraient comme leur famille, auxquels
ils étaient liés par des liens non moins forts que les liens du sang !
L’esclave était désormais un être humain à part entière dont la dignité était
protégée par la loi, et à laquelle nul ne pouvait attenter ni par le verbe ni
par l’action. Pour ce qui est du verbe, le Prophète a en effet interdit aux
maîtres de rappeler à leurs esclaves qu’ils sont des esclaves. Il leur a
ordonné de leur parler d’une manière qui leur fasse sentir l’amour familial et
qui leur fasse oublier leur statut d’esclaves. Dans le cadre de ces directives,
le Prophète leur dit : « Dieu les
a mis en votre possession. Et s’Il le voulait, c’est vous qu’il aurait mis en
leur possession ». Ainsi, ce ne sont que des vicissitudes
contingentes qui ont fait de ces êtres des esclaves. Il était donc parfaitement
possible qu’ils soient eux-mêmes maîtres de ceux qui le sont aujourd’hui !
Par cette sentence, le Prophète réduit à néant l’arrogance des maîtres et les
renvoie à la fibre humaine qui les relie tous et à l’amour qui doit gouverner
leurs relations les uns les autres. Quant à l’agression physique des esclaves,
sa sanction explicite est le talion : « Quiconque
tue son esclave, nous le tuerons ». Il s’agit d’un principe
univoque d’égalité humaine entre les esclaves et les maîtres. Ce principe
établit également de manière explicite les garanties qui entourent l’existence
de cette catégorie de gens, dont le statut contingent ne saurait les exclure de
leur authentique nature humaine. Ces garanties sont complètes et atteignent un
niveau auquel n’a su prétendre aucune législation sur l’esclavage, tout au long
de l’histoire, aussi bien avant qu’après l’avènement de l’Islam. Ainsi, le seul
fait de gifler un esclave alors que rien ne justifie sa correction — sachant
que la correction ne doit pas enfreindre la limite de ce que le maître se
permet d’administrer à ses propres enfants — constitue un
motif légal pour son affranchissement.
Passons
maintenant à l’étape suivante, celle de la libération effective...
L’étape précédente constituait en réalité une
libération morale des esclaves : ceux-ci étaient réintégrés à l’humanité
et étaient traités avec la dignité originelle qu’ils partageaient avec les
maîtres ; c’étaient des circonstances contingentes qui privaient les
esclaves de leur liberté extérieure à interagir directement avec la société.
Mais mis à part ce point, les esclaves
pouvaient jouir de tous les droits humains.
Mais l’Islam ne s’arrêta pas là, car sa base
fondamentale et suprême est l’égalité complète entre les hommes, ce qui
signifie la libération complète de tous les hommes. Par conséquent, il œuvra de
manière effective à la libération des esclaves, et ce, par deux grands
moyens : le `itq ou affranchissement gratuit et la mukâtabah
ou contrat d’affranchissement.
Le
`itq désigne l’affranchissement
volontaire et gratuit, de la part des maîtres, des esclaves qu’ils possèdent.
L’Islam a vivement incité à ce type d’affranchissement. En affranchissant ses
esclaves, le noble Messager — paix et bénédictions sur lui —, était à cet
égard le modèle de premier plan, imité par ses Compagnons. Abû Bakr dépensait
ainsi des sommes considérables pour acheter des esclaves de leur maîtres
qurayshites païens, puis les affranchissait et leur redonnait leur liberté.
Quand les ressources budgétaires le permettaient, le Trésor Public achetait
également des esclaves de leurs propriétaires et les libérait. Yahyâ Ibn
Sa`îd raconte ainsi : « Umar
Ibn `Abd Al-`Azîz m’a envoyé en Tunisie en tant que responsable du Trésor
Public. Après avoir collecté les impôts, j’ai fait quérir des pauvres auxquels
seraient redistribuées les sommes perçues. Mais nous n’avons trouvé aucun
pauvre, ni personne pour récupérer tout cet argent. `Umar Ibn `Abd Al-`Azîz
avait enrichi les gens. J’ai alors employé ces sommes à l’achat d’esclaves que
j’ai affranchis ».
Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — affranchissait également les esclaves qui enseignaient la
lecture et l’écriture à dix Musulmans, ou qui rendaient un service similaire
aux Musulmans.
Le Noble Coran a par ailleurs décrété que
l’expiation de certains péchés était l’affranchissement d’esclaves. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — incitait
en outre à affranchir des esclaves pour expier n’importe quelle faute qu’un
homme pouvait commettre, et ce, dans l’optique de libérer le plus grand nombre
possible, sachant que les péchés ne cessent jamais, et que l’être humain est
par nature pécheur, comme le rappelle le Messager. Il convient ici de porter
une attention toute particulière à l’une de ces expiations, en raison de sa
signification dans le regard que porte l’Islam sur l’esclavage. L’Islam décrète
que l’expiation de l’homicide involontaire requiert le paiement d’un prix du
sang à la famille de la victime et la libération d’un esclave : « Quiconque
tue par erreur un croyant, qu’il affranchisse alors un esclave croyant et
remette à sa famille le prix du sang » [9]. La victime tuée par erreur est une âme
humaine que sa famille et que la société dans son ensemble ont injustement
perdue. Pour cette raison, l’Islam établit deux types de dédommagements :
le dédommagement de la famille avec le prix du sang qui doit leur être payé, et
le dédommagement de la société avec la libération d’un esclave croyant. La
libération d’un esclave reviendrait en quelque sorte à donner la vie à une âme
humaine, qui vient remplacer celle qui a été involontairement tuée. En poussant
la comparaison, on est amené à la conclusion qu’au regard de l’Islam,
l’esclavage est, d’une certaine façon, une mort. Ainsi,
malgré toutes les garanties dont l’Islam entoure le statut des esclaves, il
profite de la moindre occasion pour redonner vie à ces esclaves en les
libérant de leur servitude.
L’histoire relate qu’un nombre incommensurable
d’esclaves ont été libérés à travers cet affranchissement gratuit, et que ce
nombre incommensurable ne trouve pas son pareil dans l’histoire des autres
nations, ni avant l’Islam, ni plusieurs siècles après, jusqu’au début de l’ère
moderne. Par ailleurs, les mobiles de leur
affranchissement étaient purement humains, et découlaient des consciences
individuelles qui désiraient gagner l’Agrément de Dieu, rien d’autre que
l’Agrément de Dieu.
Quant
à la mukâtabah, elle consiste
à accorder à l’esclave sa liberté lorsqu’il la demande de son propre chef,
moyennant une somme d’argent convenue entre le maître et l’esclave.
L’affranchissement est dans ce cas obligatoire : le maître ne peut ni le
refuser ni le reporter, dès lors que la somme d’argent convenue lui a été
versée. En cas de problème, l’État (représenté par le juge ou par le dirigeant)
intervient pour exécuter de force le contrat d’affranchissement et donner la
liberté à son demandeur.
La légifération de la mukâtabah a réellement
ouvert les portes de la libération des esclaves en Islam, puisqu’elle permet à
l’esclave qui veut recouvrer sa liberté de s’affranchir, sans attendre que son
maître le libère gratuitement à une occasion qui pourrait survenir, ou qui
pourrait ne jamais survenir au fil des jours et des années.
Dès le premier instant où l’esclave demande ce contrat
d’affranchissement — que le maître ne peut refuser du moment que sa libération
ne présente pas de danger pour la sécurité intérieure de l’État
islamique — tout le travail qu’il effectuera
désormais pour son maître sera rémunéré. Ou alors, il aura la possibilité, s’il
le souhaite, de travailler à l’extérieur pour réunir la somme convenue pour le
rachat de sa liberté.
Cette voie fut celle empruntée par l’Europe au XIVe
siècle, soit sept siècles après que l’Islam l’eut initiée. Néanmoins, une
différence majeure distingue l’Islam : la prise en charge par l’État des
esclaves demandant une procédure d’affranchissement, et ce, en sus des efforts
gigantesques consentis par l’Islam pour affranchir les esclaves gratuitement,
sur la base d’un volontariat individuel visant à se rapprocher de Dieu et à Le
servir avec loyauté.
Le verset qui désigne les ayant-droits de l’aumône
légale (zakâh) dit la chose suivante : « Les
aumônes ne sont destinées que pour les pauvres, les indigents, ceux qui y
travaillent, [...] pour l’affranchissement des esclaves » [10]. Ainsi, il est clairement établi que le
Trésor Public doit employer l’aumône légale, entre autres à aider les esclaves
désireux de s’affranchir de racheter leur liberté, si eux-mêmes sont incapables
de le faire avec leurs propres économies.
L’Islam a donc été l’auteur d’une considérable et
réelle avancée dans la libération des esclaves. Il a été en avance d’au moins
sept siècles sur tout le développement historique. En plus de ce développement,
il s’est distingué par d’autres éléments — comme les garanties assurées par
l’État — auxquels le monde n’a commencé à s’intéresser qu’au début des temps
modernes, ainsi que par des éléments que le monde ignore toujours, que ce soit
au niveau du bon traitement des esclaves ou de l’affranchissement volontaire et
gratuit, sans aucune contrainte d’ordre économique ou politique, à l’instar de
celles qui ont obligé l’Occident à libérer les esclaves, comme nous
l’expliquerons par la suite.
Ainsi tombent les foutaises prétendûment savantes des
communistes, selon lesquelles l’Islam est un maillon parmi d’autres du
développement économique, apparu au moment où il devait apparaître, et
obéissant aux lois du matérialisme dialectique. Or voici que l’Islam a été en
avance de sept siècles sur l’époque à laquelle il était censé apparaître. Des
foutaises selon lesquelles également tout système — y compris l’Islam — n’est
que le reflet du stade auquel est parvenu le développement économique au moment
de son avènement, de sorte que toutes ses doctrines et conceptions sont en
adéquation avec ce stade de développement, sans pour autant le précéder ni même
être en mesure de le précéder. Ainsi en a décidé l’esprit infaillible qui ne
peut se fourvoyer, l’esprit de Karl Marx — que sa mémoire soit
sanctifiée ! Mais voici que l’Islam ne s’est pas inspiré des systèmes
économiques en vigueur alors dans la Péninsule arabique ou dans le reste du monde, que
ce soit au niveau des esclaves, du partage des richesses, de la relation entre
le gouvernant et le gouverné ou du patron et du salarié. Il définissait en
revanche ses propres systèmes socio-économiques, de manière indépendante et
inédite. Et sous plusieurs de ses aspects, il se distingue encore de manière
unique sur toute l’histoire de l’humanité.
Se pose alors la question qui intrigue
les esprits et les consciences : puisque l’Islam a commis autant
d’avancées vers la libération des esclaves, et puisqu’il a précédé le monde
entier en ce sens, de manière volontaire, sans qu’il y soit obligé ni contraint,
alors pourquoi n’a-t-il pas fait le dernier pas décisif, en déclarant sans
ambages et de la manière la plus explicite qui soit, l’abolition principielle
de l’esclavage ?
Pour répondre à cette question, il nous faut
appréhender des réalités sociologiques, psychologiques et politiques qui ont
entouré le thème de l’esclavage, et qui ont poussé l’Islam à poser les
principes propres à la libération des esclaves, puis à les laisser agir
d’eux-mêmes sur le long terme.
Nous devons tout d’abord rappeler que la liberté ne
s’octroie pas mais se gagne. Contrairement aux illusions de certains, un simple
décret abolissant l’esclavage n’est pas de nature à libérer les esclaves.
L’expérience américaine dans la libération des esclaves par un simple coup de
crayon d’Abraham Lincoln est la meilleure preuve de ce que nous avançons. Les
esclaves libérés extérieurement par Lincoln au moyen d’une loi, n’ont pas
supporté le poids de leur liberté : ils sont revenus chez leurs maîtres
les priant de les accepter en tant qu’esclaves comme ils l’ont toujours été.
Car, intérieurement, ils ne s’étaient pas encore eux-mêmes libérés.
Cela peut paraître étrange, mais tout paraît plus
clair lorsqu’on examine le problème à la lumière des réalités psychologiques.
La vie est une question d’habitudes, et ce sont les conjonctures traversées par
l’homme qui façonnent ses sentiments, ses sensations et ses facultés
psychiques. La psychologie d’un esclave diffère de la psychologie d’un homme
libre, non pas parce que le premier serait issu d’une race inférieure, comme le
pensaient les Anciens, mais parce que sa vie d’asservissement permanent a
façonné ses facultés psychiques de telle sorte qu’elles soient adaptées à la
conjoncture qu’il traverse. Ainsi, se développera en lui jusqu’à son paroxysme
le sens de l’obéissance, tandis que s’inhiberont jusqu’à leur paroxysme le sens
de la responsabilité et l’aptitude à assumer les conséquences de ses actes.
L’esclave sait accomplir beaucoup de choses lorsque
son maître le lui demande. Il n’a en effet qu’à obéir et à exécuter les ordres.
Mais il ne sait rien faire de lui-même, même les choses les plus banales, dès
lors que c’est lui qui doit en porter la responsabilité. Non pas qu’il en soit
physiquement incapable, ni parce que son esprit est incapable de comprendre ces
choses, mais parce que, psychologiquement, il ne parvient pas à en assumer les
conséquences. Il s’imagine tout un tas de périls fantasmés et de problèmes
insolubles devant lesquels il fuit de peur d’avoir à les affronter.
Les observateurs attentifs de la vie égyptienne — et
orientale en général —, au cours des dernières décennies, pourront
retrouver les traces de cet asservissement qui ne dit pas son nom, et qu’a
instillé le colonialisme machiavélique dans les âmes des Orientaux dans le but
de les asservir à l’Occident. Ils pourront les retrouver à travers tous ces
projets suspendus ou abandonnés, et que n’a suspendu le plus souvent que la
peur d’en assumer les résultats. Ou ces projets qui ont été étudiés mais que
les gouvernements refusent de réaliser avant d’avoir fait venir un expert
anglais ou américain, qui puisse les décharger de la responsabilité du dit
projet et qui donnera son feu vert pour la réalisation. Ou encore cette
terrifiante paralysie administrative qui plane sur les fonctionnaires et qui
enchaîne leur capacité productive à une routine cristallisée ; nul
fonctionnaire ne peut en effet faire autre chose que ce que lui a ordonné son
maître, « Monsieur » le haut fonctionnaire, qui lui-même ne sait rien
faire d’autre qu’obéir à son maître, « Monsieur » le Ministre. Non
pas que les uns ou les autres ne soient pas capables d’agir de leur propre
chef, mais parce que leur sens de la responsabilité est inhibé, alors que leur
sens de l’obéissance est démesuré. Ils sont ainsi tout ce qu’il y a de plus
ressemblant avec des esclaves, même si, officiellement, ce sont des hommes
libres.
C’est donc cet état psychologique qui asservit
l’esclave. C’est bien entendu un état contingent, qui s’est développé à partir
de conjonctures extérieures, mais qui, au fil du temps, est devenu indépendant,
a pris une existence qui lui est propre, à l’instar du rameau d’un arbre qui,
en touchant la terre, développe ses propres racines et prend son indépendance
vis-à-vis de la plante-mère. Cet état psychologique ne peut être balayé par un
décret politique abolissant l’esclavage. C’est de l’intérieur qu’il doit être
métamorphosé, et ce, en créant de nouvelles conjonctures permettant aux
sentiments de prendre une toute autre direction, en développant chez l’esclave
ses facultés inhibées, et de bâtir un être humain sainement constitué, à partir
de l’être déshumanisé qu’il était.
Et
c’est ce qu’a fait l’Islam...
L’Islam a commencé par exiger le bon traitement des
esclaves, car rien d’autre qu’un bon traitement ne peut rendre son équilibre à
une psychologie déviante. Il s’agit de lui rendre son estime afin qu’elle
prenne conscience de son humanité et de sa dignité propre. Dès lors que cela se
réalise, elle ressent d’elle-même le goût de la liberté et n’en est pas rebutée
comme l’ont été les esclaves américains fraîchement libérés.
L’Islam poussa le bon traitement et la réhabilitation
de la dignité humaine des esclaves à un point incroyable, illustré par les
versets du Coran et les enseignements du Messager que nous avons cités
précédemment et que nous nous apprêtons à étayer ci-dessous par des exemples
très concrets.
Le Messager — paix et bénédictions sur lui — scellait
des liens fraternels entre certains esclaves et certains notables arabes. Il
conclut ainsi des liens fraternels entre Bilâl Ibn Rabâh et Khâlid Ibn
Ruwayh Al-Khath`amî, entre son esclave affranchi Zayd et son oncle Hamzah,
ou encore entre Khârijah Ibn Zayd et Abû Bakr. Cette fraternisation constituait
un véritable lien, non moins puissant que les liens du sang, et donnait des
droits en matière d’héritage.
Ce
n’était pas tout...
Le Prophète maria également sa cousine
Zaynab Bint Jahsh à son esclave Zayd.
Le mariage est en réalité une question délicate, notamment pour la femme. Une
femme acceptera d’épouser un homme d’un plus haut niveau social, mais elle
refusera que son mari soit issu d’une catégorie sociale inférieure. Elle
ressentirait cela comme une atteinte à sa dignité et à son orgueil. Mais le
Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — voulait établir une
signification bien plus profonde : il voulait extirper les esclaves des
tréfonds vers lesquels ils ont été précipités par une humanité injuste et les
élever au rang des plus illustres notables arabes qurayshites.
Ce
n’était pas tout non plus...
Le Messager envoya Zayd à la tête d’une
armée dont les soldats n’étaient autres que des notables arabes parmi les Muhâjirûn
et les Ansâr. Lorsqu’il fut tué, il désigna son fils, Usâmah Ibn
Zayd, à la tête de l’armée, une armée qui comptait dans ses rangs Abû Bakr et
`Umar, les deux ministres et successeurs du Prophète, futurs Califes de la Communauté musulmane.
Ainsi, le Prophète n’octroyait pas seulement aux esclaves un statut d’égalité
humaine ; il leur donnait également le droit de diriger et de gouverner
des hommes libres.
Il en vint ainsi à déclarer : « Obéissez aux ordres même si vous êtes
gouvernés par un esclave noir abyssin, dont la tête ressemble à un raisin sec,
du moment qu’il vous dirige selon le Livre de Dieu — Exalté soit-Il — » [11]. Il accorda ainsi aux esclaves et aux
affranchis le droit d’accéder à la plus haute fonctions de l’État, celle du dirigeant
de la Communauté
musulmane. `Umar dit au moment où il devait préparer sa succession : « Si Sâlim, l’affranchi de Abû Hudhayfah,
était encore parmi nous, je l’aurais nommé à ma succession ». Le
Calife réaffirma ainsi les principes énoncés par le Messager — paix et
bénédictions sur lui —.
À une autre occasion, `Umar montra l’exemple de la
plus belle des manières, en ce qui concerne le respect des esclaves et des
affranchis. Bilâl Ibn Rabâh s’opposa à lui avec virulence sur la
question de la répartition du butin. `Umar ne trouva rien d’autre à dire que
d’implorer : « Seigneur, préserve-moi de Bilâl et de ses
partisans ! » Lui, le Calife qui pouvait, s’il le voulait, ordonner
et être obéi.
Ces modèles apportés par l’Islam avaient pour but de
libérer les esclaves de l’intérieur, comme nous l’avons déjà répété au début de
ce chapitre, afin que l’esclave prenne conscience de son individualité et
réclame de lui-même sa liberté. C’est là la véritable garantie de la libération
des esclaves.
Il est vrai que l’Islam a encouragé l’affranchissement
gratuit et l’a prôné par tous les moyens. Mais cela faisait en soi partie de
l’éducation psychologique des esclaves, afin qu’ils ressentent qu’il leur est
possible de regagner leur liberté et de jouir de tous les droits réservés aux
maîtres. Ainsi se développe en eux la volonté de retrouver la liberté et d’en
assumer les conséquences. Dès lors, l’Islam s’empresse de la leur accorder, car
ils en sont devenus dignes, aptes à la préserver.
La différence est grande entre ce système
qui encourage les hommes à demander la liberté, leur donne les moyens d’y
parvenir puis, la leur accorde à l’instant où ils la demandent de leur propre
chef, et entre des systèmes qui laissent les choses se compliquer et
s’aggraver, jusqu’à ce qu’éclatent des révolutions socio-économiques qui
déciment les vies par centaines et par milliers, puis qui n’accordent la
liberté à ses demandeurs que sous la contrainte et à contre cœur.
L’une des vertus majeures de l’Islam dans la question
de l’esclavage est qu’il s’est attaché à la véritable libération des esclaves,
une libération aussi bien intérieure qu’extérieure. Il ne s’est pas contenté de
bonnes intentions comme l’a fait Lincoln lorsqu’il a édicté une loi n’ayant que
bien peu de poids dans le cœur des esclaves. Ceci prouve la profondeur avec
laquelle l’Islam appréhende la nature humaine, et sa capacité à déceler les
meilleurs moyens de la curer. À cela s’associe le volontarisme dont fait preuve
l’Islam pour octroyer les droits à leurs détenteurs légitimes, tout en éduquant
ces derniers à se cramponner à ces droits et à en assumer les conséquences.
Pour parvenir au mieux à cette fin souhaitée, l’Islam fait appel aux sentiments
d’amour et d’affection entre les différentes composantes de la société, avant
qu’elles ne s’entretuent pour ces droits, comme cela a eu lieu en Europe, où
les exécrables tueries ont tari les sentiments et transmis des haines
héréditaires. Ainsi, tout le bien ayant pu être récolté par l’humanité s’en est
trouvé corrompu pendant son parcours.
Intéressons-nous
maintenant au principal facteur ayant conduit l’Islam à poser les fondements de
la libération des esclaves et à le laisser exercer son effet au fil des
générations.
L’Islam a tari toutes les anciennes sources
d’esclavage, excepté une seule qu’il ne pouvait tarir : il s’agit de
l’esclavage dû à la guerre. Soyons plus précis.
La coutume dominante à l’époque consistait à
l’asservissement ou à l’exécution des prisonniers de guerre. Cette coutume
était très ancienne, ancrée dans les profondeurs de l’histoire, remontant sans
doute au premier homme. Elle accompagna l’humanité dans chacune des étapes de
son développement.
À l’avènement de l’Islam, la situation n’avait pas
changé. Lorsque des guerres éclatèrent et opposèrent l’Islam à ses ennemis, ces
derniers asservirent leurs prisonniers musulmans, les privèrent de leur
liberté, traitèrent les hommes de la manière habtituelle dont étaient alors
traités les esclaves, violente et injuste, tandis que les femmes étaient
violées par tout un chacun : une femme unique servait ainsi aussi bien à
un homme, qu’à ses enfants, qu’à ses amis désireux eux aussi de s’amuser. Aucun
ordre ne régnait et aucun contrôle ne s’exerçait. L’humanité de ces femmes
n’était nullement respectée, qu’elles soient vierges ou pas. Quant aux enfants
capturés, ils grandissaient dans l’exécrable humiliation de l’esclavage.
Dans ces conditions, il était malvenu que les
Musulmans libèrent les prisonniers ennemis qu’ils avaient capturés. Il est en
effet politiquement irresponsable d’aider votre ennemi en libérant ses
prisonniers, tandis que votre famille, votre clan et vos coreligionnaires
endurent la persécution et les souffrances chez l’ennemi. Le traitement
réciproque devient ici le meilleur, voire le seul code auquel s’en tenir. Mais
malgré tout, on constate de profondes différences
entre l’Islam et les autres systèmes en ce qui concerne le droit de la guerre
et le statut des prisonniers de guerre.
Dans le monde non-musulman, hier comme aujourd’hui,
les guerres n’ont d’autre but que la conquête, le massacre et l’asservissement.
Elles puisent leur raison d’être dans la volonté de telle nation de conquérir
d’autres nations, et d’étendre ses territoires à leurs dépens, ou de piller
leurs ressources. Ces guerres sont aussi parfois déclenchées pour assouvir les
désirs personnels d’un roi ou d’un chef militaire qui veut satisfaire son
arrogance personnelle et s’ébrouer d’orgueil et de vanité, ou qui cherche
vengeance, ou pour tout autre de ces motifs terrestres et mesquins. Les captifs
asservis n’étaient alors pas asservis en raison de la différence de religion,
ni parce que leur niveau moral, psychologique ou intellectuel était inférieur à
celui de leurs ravisseurs, mais tout simplement parce qu’ils avaient été
vaincus à la guerre.
Par ailleurs, ces guerres n’étaient pas régies par des
règles qui prohibent le viol, la destruction des villes pacifiques, le meurtre
des femmes, des enfants et des vieillards. Mais, soit dit en passant, cela
était parfaitement logique puisque ces guerres n’étaient guère déclenchées pour
défendre une doctrine, un principe ou une noble cause.
En faisant son apparition, l’Islam a aboli toutes ces
considérations, et a prohibé toute guerre, sauf s’il s’agit d’un combat pour la Cause de Dieu, c’est-à-dire
un combat pour repousser l’agression contre les Musulmans, ou pour détruire les
forces oppressives qui persécutent les hommes pour les détourner de leur
religion, ou encore pour supprimer les forces égarées qui se posent en
obstacles devant le message de l’Islam, empêchant que la vérité soit véhiculée
aux hommes pour qu’ils voient et entendent de quoi il s’agit.
« Combattez dans le sentier de Dieu
ceux qui vous combattent, mais ne transgressez pas. Certes. Dieu n’aime pas les
transgresseurs ! » [12]
« Combattez-les jusqu’à ce qu’il
n’y ait plus de persécution et que la religion soit entièrement à Dieu
seul. » [13]
C’est donc un message pacifique et non
contraignant : « Nulle contrainte en religion !
Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. » [14]
La présence de Juifs et de Chrétiens dans le monde
musulman jusqu’à l’heure actuelle est la preuve catégorique, indiscutable et
irréfutable que l’Islam n’a pas contraint autrui à se convertir sous la menace
du sabre.
Si les gens acceptaient l’Islam et se laissaient
guider à la religion de vérité, alors il ne saurait être question de guerre, de
conflit ou de soumission d’une nation à une autre, tout comme il ne saurait y
avoir de discrimination entre un Musulman et un autre sur cette terre, car un
Arabe n’a pas plus de mérite qu’un non-Arabe, si ce n’est par la piété.
Quant à ceux qui refusaient l’Islam et préféraient
garder leur foi sous les auspices du système musulman, ils étaient libres de
leur choix sans contrainte ni pression d’aucune sorte, même si l’Islam estime
qu’il est meilleur et plus fondé que la foi en question. En contrepartie de la
protection que leur garantissait l’Islam, ils devaient payer une capitation (jizyah).
Cette capitation était annulée ou remboursée si les Musulmans se montraient
incapables d’assurer la protection de leurs ressortissants non-Musulmans. Si
les non-Musulmans refusaient l’Islam et la capitation, c’est qu’ils faisaient
preuve d’un entêtement arrogant et qu’ils refusaient que le message pacifique
fasse son chemin : ils voulaient stopper et étouffer par la force des
armes le parcours de la lumière nouvelle que les peuples seraient tentés de
suivre si on leur laissait la possibilité de l’apercevoir.
C’est alors seulement que la guerre était déclenchée,
non sans avoir préalablement formulé un nouvel avertissement, afin de donner
une dernière chance à la paix mondiale et à la préservation des vies : « S’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci
toi aussi et place ta confiance en Dieu » [15].
Telle
était la guerre islamique. Elle
n’était fondée ni sur des désirs de conquêtes, ni sur la volonté d’exploiter
d’autrui, ni sur la suffisance d’un chef militaire ou d’un roi despotique.
C’était une guerre pour la Cause
de Dieu et pour la guidance de l’humanité, lorsque échouaient tous les moyens
pacifiques qui permettaient de guider les hommes.
Cette guerre était régie par des règles. Le Messager —
paix et bénédictions sur lui — disait dans ses recommandations : « Guerroyez au Nom de Dieu et pour la Cause de Dieu. Combattez les
dénégateurs de Dieu. Guerroyez mais ne trahissez pas, ne mutilez pas, ne tuez
pas les enfants » [16].
Ne peut donc être tué que le guerrier qui porte son
arme pour combattre les Musulmans. La destruction, le viol, le libre cours aux
instincts maléfiques et corrupteurs sont strictement hors de propos : « Certes, Dieu n’aime point les corrupteurs » [17].
Les Musulmans ont respecté ces nobles règles qui sont
les leurs dans toutes leurs guerres, y compris pendant les traîtresses
Croisades. Lorsqu’ils vainquirent leurs ennemis, qui, dans une manche
précédente, avaient violé les interdits, avaient attaqué la Mosquée Al-Aqsâ,
faisant couler à flots le sang de ceux qui y avaient trouvé refuge auprès de
Dieu — le Seigneur de tous —, ils ne se vengèrent pas à l’heure de la
victoire. Pourtant, la religion elle-même leur donnait la permission de faire
subir à leurs ennemis un traitement réciproque :
« Quiconque vous agresse,
agressez-le, à agression égale. » [18] Néanmoins, ils donnèrent l’exemple suprême,
que les non-Musulmans, de quelque pays qu’ils soient, n’ont jamais pu
reproduire, y compris à l’ère moderne.
C’est là une différence fondamentale entre les
objectifs et les règles de la guerre chez les Musulmans et chez les
non-Musulmans. S’il le voulait, et tout en étant dans son bon droit, l’Islam
pouvait considérer les prisonniers qu’il capturait et qui s’entêtaient à
refuser la vérité et à rester sur leur idolâtrie inférieure et sur leurs
superstitions païennes, comme des êtres déficients en humanité. Il pouvait les asservir
pour cette unique raison. Car un humain qui persiste à croire à ces chimères —
après avoir vu la vérité — fait preuve, soit d’une bassesse de l’âme, soit
d’une déviance de l’esprit. Dans les deux cas, son statut d’humain est
déficient et il n’est pas digne de l’honneur réservé aux humains, ni de la
liberté réservée au genre humain.
Cependant, l’Islam n’a pas asservi les prisonniers
parce qu’il les considérait comme déficients en humanité, mais parce qu’ils
étaient venus en agresseurs des territoires musulmans, ou parce qu’ils
s’étaient posés en obstacles, appuyés par la force militaire, entre la guidance
divine et les cœurs des hommes.
Et malgré tout ceci, l’asservissement des prisonniers
n’était pas la règle immuable pratiquée par l’Islam. Le Messager — paix et
bénédictions sur lui — libéra ainsi des prisonniers de la bataille de Badr
gratuitement sans exiger de rançon, et en libéra d’autres moyennant rançon. Il
préleva la capitation sur les Chrétiens de Najrân et leur rendit leurs
prisonniers, donnant ainsi l’exemple qu’il voulait que l’humanité suive à
l’avenir.
Il convient par ailleurs d’indiquer à cet égard que le
seul verset ayant trait au sort des prisonniers de guerre ne fait pas mention
de l’asservissement : « Ensuite, c’est soit la libération gratuite,
soit la rançon, jusqu’à ce que la guerre dépose ses fardeaux. » [19] Ce verset mentionne seulement la libération
moyennant rançon et la libération gratuite, et ce, afin que l’asservissement ne
devienne pas une règle universelle ni une nécessité absolue. Il est maintenu au
statut de simple option à laquelle l’armée musulmane pourra recourir si les
circonstances et la conjoncture l’exigent.
À cela s’ajoute le fait que les prisonniers qui
tombaient entre les mains de l’Islam étaient traités de cette manière noble et
généreuse que nous avons décrite précédemment. Ils ne rencontraient ni
humiliation ni torture. Et on leur ouvrait les portes de la liberté dès lors
qu’ils la voulaient et se sentaient capables de l’assumer, sachant que la
plupart d’entre eux n’étaient pas des hommes libres au moment de leur capture,
mais étaient des esclaves que les Perses ou les Romains avaient asservis et
poussés à combattre les Musulmans.
Ainsi, il ne s’agissait pas d’asservir pour asservir,
l’esclavage n’étant pas un fondement immuable que l’Islam entendrait conserver,
l’orientation générale induite par tous les textes afférents étant celle de la
libération des esclaves.
L’esclavage
n’est qu’une situation temporaire menant au final à la libération.
À l’éclatement d’une guerre entre les Musulmans et les
ennemis de l’Islam, certains prisonniers infidèles peuvent tomber entre les
mains des Musulmans. Dans certains cas, non dans tous, et sans que cela soit
automatique, ces prisonniers deviennent des esclaves. Ils vivent alors pendant
un certain temps dans un milieu social musulman, pendant lequel ils peuvent
observer à loisir la justice divine concrètement réalisée sur le terrain. Ils
sont embrassés par l’esprit de miséricorde de l’Islam qui les traite avec bonté
et humanité. Leurs âmes s’imprègnent de la chaleur réconfortante de l’Islam et
leurs consciences s’ouvrent à la lumière. L’Islam les libère alors en les
affranchissant gratuitement dans certains cas, ou en leur accordant un contrat
d’affranchissement, dès lors qu’ils aspirent d’eux-mêmes à recouvrer leur
liberté.
La période qu’ils auront passée sous l’esclavage
devient ainsi en réalité une période de cure psychologique et spirituelle,
pendant laquelle on les traite avec bonté, en leur faisant ressentir leur
statut naguère piétiné d’êtres humains, et en orientant leurs âmes vers la
lumière divine, sans contrainte d’aucune sorte. Au bout de ce processus, se
trouve alors la libération, à supposer bien entendu que les prisonniers aient
été asservis, ce qui n’est certainement pas la seule issue choisie par l’Islam
pour les prisonniers, comme en témoigne le précédent verset et l’attitude
concrète adoptée par le Messager — paix et bénédictions sur lui — dans ses
différentes batailles.
Quant aux femmes, l’Islam les a honorées — y compris
en tant qu’esclaves — par rapport à ce qu’elles subissaient dans les pays non musulmans.
Leur honneur n’était plus un butin auquel tout un chacun pouvait
prétendre ; elles n’étaient plus réduites à la prostitution, alors que
c’était le sort qui attendait le plus souvent les captives de guerre. L’Islam a
fait des femmes esclaves la propriété exclusive de leur maître ; nul autre
que lui ne pouvait s’introduire auprès d’elles. Il leur a accordé le droit de
recouvrer leur liberté par un contrat d’affranchissement ; et une esclave
qui accouchait d’un enfant de son maître s’affranchissait automatiquement, en
même temps que son enfant. Elles avaient en outre droit au bon traitement
commandé par l’Islam.
Telle est l’histoire de l’esclavage dans l’Islam, une
page glorieuse de l’histoire de l’humanité. L’Islam n’a pas fait de l’esclavage
un fondement immuable. La preuve en est qu’il a pris toutes les mesures pour
libérer les esclaves, et qu’il a tari de manière définitive toutes les sources
d’esclavage, à l’exception d’une seule qui est celle des prisonniers capturés
pendant une guerre déclarée menée pour la Cause de Dieu. Nous avons vu que même dans ce
cas, l’esclavage n’était pas automatique, et en cas d’asservissement, c’était
pour une durée limitée menant au final à la libération.
Quant à ce qui s’est passé à certaines périodes
islamiques, où l’esclavage n’était pas seulement alimenté par les prisonniers
capturés dans les guerres religieuses, mais provenait également de la traite
esclavagiste, du rapt et du commerce de populations pacifiques dont le simple
asservissement n’avait pas lieu d’être, alors imputer ces exactions à l’Islam
n’est ni plus vrai ni plus juste que d’imputer les exactions et les turpitudes
de nos dirigeants musulmans actuels à l’Islam [20].
Nous
devons garder à l’esprit un certain nombre de points à ce sujet.
Premièrement, dans les autres pays, les sources qui
alimentaient l’esclavage étaient nombreuses. Elles n’étaient pas dues à une
nécessité vitale mais à un désir d’esclavagisme : l’asservissement d’une
nation à une autre, d’une race à une autre, l’asservissement dû à la pauvreté,
l’asservissement héréditaire dû à la naissance dans une caste donnée,
l’asservissement de servage, etc. L’Islam a aboli toutes ces sources
d’esclavage, à l’exception d’une seule dont nous avons expliqué les tenants et
les aboutissants au cours de cet exposé.
Deuxièmement, malgré le nombre injustifié de ses
sources d’esclavage, l’Europe n’a pas aboli l’esclavage de son plein gré. Les
auteurs européens reconnaissent en effet que l’Europe a aboli l’esclavage
lorsque la productivité des esclaves a diminué, en raison de leurs conditions
de vie déplorables et de leur manque de volonté et de capacité à travailler. Le
coût d’entretien et de gardiennage de l’esclave est devenu supérieur à sa
productivité. En fin de compte, il ne s’agissait que d’un calcul économique de
bénéfices et de pertes. Il n’y avait pas l’ombre d’une valeur humaniste de
dignité du genre humain au nom de laquelle serait redonnée à l’esclave sa
liberté. À ces considérations économiques et matérielles viennent s’ajouter les
révoltes successives des esclaves qui empêchèrent la pérennité de leur
asservissement.
Et malgré tout, l’Europe ne leur accorda
pas la liberté pour autant. D’esclaves appartenant à leurs maîtres, ils
devinrent des serfs appartenant à des domaines seigneuriaux. Ils étaient vendus
et achetés avec les terres domaniales, sur lesquelles ils devaient travailler,
sans possibilité pour eux de les quitter. S’ils partaient, ils étaient
considérés comme des fuyards que la loi permettait de faire revenir attachés
par des chaînes et brûlés au fer rouge. Ce fut cette forme d’esclavage qui
demeura en vigueur jusqu’à son abolition par la Révolution française au
XVIIIe siècle, soit plus de mille cent ans après que l’Islam eut
établi le principe de la libération des esclaves.
Troisièmement, nous ne devons nous laisser berner par
les appellations. Il est vrai que la Révolution française a aboli l’esclavage en
Europe, que Lincoln a aboli l’esclavage en Amérique, puis que le monde entier a
décidé d’abolir l’esclavage, mais tout ceci n’est qu’apparence. Quel est donc
cet esclavage que l’on a aboli ? Si l’esclavage a vraiment été aboli, quel
nom donner alors à ce qui se passe aujourd’hui de par le monde entier ?
Quel nom donner à ce que commettait la France dans le Maghreb musulman ? Quel nom
donner à ce que commet l’Amérique à l’encontre des Noirs ? Quel nom donner
à ce que commet l’Angleterre à l’encontre des gens de couleur en Afrique du
Sud ?
L’esclavage ne désigne-t-il pas dans sa réalité la
dépendance d’un groupe de gens vis-à-vis d’un autre groupe et la privation
d’une catégorie d’humains de droits reconnus à autrui ? Ou bien désigne-t-il
autre chose ? Qu’est-ce à dire si cela porte l’appellation d’esclavage ou
s’il porte l’appellation de liberté, d’égalité et de fraternité ? À quoi
riment les solgans pompeux lorsque les vérités qu’elles couvent sont les plus
ignobles qu’a connues l’humanité tout au long de son histoire ?
L’Islam a été honnête avec lui-même et avec les hommes
lorsqu’il a dit : « Ceci s’appelle esclavage. Sa cause unique est
tant. Et la voie vers la libération est ouverte ».
La civilisation artificielle dans laquelle nous vivons
n’a pas, quant à elle, cette honnêteté. Elle s’évertue en revanche à falsifier
les vérités et à les maquiller avec des slogans pompeux. Des centaines de
milliers de personnes en Tunisie, en Algérie et au Maroc ont été massacrées.
Leur seul crime était de revendiquer leur liberté et leur dignité humaine, la
liberté de vivre dans leur pays sans ingérence extérieure, de parler leur
propre langue, de pratiquer leur propre foi, de ne servir que leur propre
patrie et d’interagir directement avec le monde dans les domaines politique,
économique, etc. Le massacre de ces innocents, leur incarcération dans des
prisons immondes sans nourriture et sans eau, le viol et le meurtre injustifié
de leurs femmes, l’éventrement des femmes enceintes soumises à un pari sur le
sexe de leur fœtus, tout cela s’appelle, au XXe siècle,
civilisation, modernité, diffusion des valeurs de liberté, d’égalité et de
fraternité. Quant au traitement exemplaire de dignité que réservait l’Islam aux
esclaves voici treize siècles, de son plein gré et dans un souci de respect de
la dignité du genre humain dans tous ses états, tout en déclarant concrètement
que l’esclavage était une situation temporaire et non un état définitif, cela
s’appelle obscurantisme, attardement, barbarie.
Lorsque les Américains apposent à l’entrée de leurs
hôtels et de leurs clubs des pancartes indiquant « Réservé aux
Blancs » ou mentionnant, dans la plus ignoble des insolences, « Interdit
aux Noirs et aux chiens », lorsqu’un groupe de Blancs « civilisés »
s’attaquent à un homme de couleur, le jettent à terre et le lynchent à mort,
tandis que le policier assiste passivement à la scène, n’intervenant pas pour
sauver son frère de patrie, de religion et de langue, son frère humain avant
tout, pour la simple raison que la victime a osé sortir — en tant que personne
de couleur — avec une jeune Américaine blanche sans honneur et pleinement
consentante, alors ce sera le summum de la civilisation et de l’élévation
auxquelles est parvenu le XXe siècle.
En revanche, lorsque l’esclave zoroastrien menace
`Umar de le tuer, et que `Umar saisit parfaitement la menace, sans pour autant
qu’il ne l’emprisonne ou ne l’exile, pour ne pas dire qu’il ne le tue, sachant
que cet esclave n’est pas pleinement humain, puisqu’il adore le feu et persiste
dans son fanatisme à vouer un culte à l’erreur après avoir vu la vérité, alors
`Umar atteint le comble de la barbarie. Il atteint le comble du mépris du genre
humain car il déclare simplement : « L’esclave m’a
menacé ! » et le laisse libre de commettre son crime et d’assassiner
le Calife des Musulmans, n’ayant pas de preuves contre lui avant qu’il commette
le meurtre.
L’histoire des peuples africains, leur privation de
leurs droits humains, les massacres dont ils furent victimes et, selon les
termes consacrés par l’ignoble presse anglaise, la « chasse » qu’on
leur livrait pour avoir poussé l’audace jusqu’à prendre conscience de leur
dignité et de réclamer leur liberté, constituent l’apogée de la justice
britannique, l’âge d’or de la civilisation humaine, la victoire des valeurs
supérieures au nom desquelles se justifie la mise sous tutelle par l’Europe du
reste du monde. Quant à l’Islam, c’est la barbarie à l’état brut, car il n’a
pas appris à « chasser » des humains et à prendre plaisir à les tuer
en raison de la noirceur de leur peau. Son enfoncement dans l’attardement et
l’obscurantisme est parvenu à un point tel qu’il a déclaré : « Obéissez
aux ordres même si vous êtes gouvernés par un esclave noir abyssin dont la tête
ressemble à un raisin sec ! »
Quant à la
femme, c’est une tout autre histoire.
L’Islam a permis au maître de posséder un certain
nombre de femmes esclaves, capturées pendant la guerre, dont lui seul pouvait
jouir, ou qu’il pouvait épouser s’il le désirait. Aujourd’hui, telle une vierge
effarouchée, l’Europe condamne ces agissements et se dissocie de cette
bestialité monstrueuse qui considère les femmes esclaves comme des objets de
consommation et de la chair sans honneur et sans dignité, une bestialité
obsédée par l’assouvissement du plaisir sauvage et immonde d’un homme qui ne
dépasse guère le rang d’animal.
Le véritable crime de l’Islam à ce sujet est qu’il ne
permet pas la prostitution ni le proxénétisme. Dans les autres pays, les
captives de guerre sombraient inéluctablement dans la fange du vice. Elles
n’avaient en effet aucun soutien financier et leurs maîtres ne ressentaient à
leur égard aucune jalousie pour leur honneur. Ils les faisaient travailler dans
cette exécrable profession et gagnaient leur vie à travers ce trafic immonde :
le trafic des honneurs. L’Islam, la religion attardée, n’a pas accepté quant à
lui la prostitution. Il s’est attaché à préserver la société propre de toute
souillure criminelle. Il a ainsi fait de ces femmes esclaves la propriété
exclusive de leurs maîtres respectifs. Ces derniers devaient les nourrir, les
vêtir, les préserver du vice, et satisfaire leurs besoins sexuels —
accessoirement — en même temps qu’eux-mêmes satisfaisaient les leurs.
La conscience européenne ne parvient pas, quant à
elle, à supporter cette bestialité. Pour cette raison, elle autorisa la
prostitution et lui offrit des garanties et des protections juridiques !
Elle poussa même le zèle jusqu’à aller la répandre sur chaque territoire
colonisé que ses pieds foulaient. À part l’appellation, qu’est-ce qui a donc
changé avec l’esclavage ? Où est la dignité de la prostituée lorsqu’elle
ne peut repousser les demandes de ses clients ? Quelle dignité a-t-elle
lorsqu’elle n’est demandée que pour la plus abjecte des avances à laquelle
l’humanité peut se rabaisser : la demande d’un corps brut dénuée de tout
sentiment et dépourvue de toute valeur spirituelle ? Quelle comparaison
peut-on établir entre cette souillure physique et morale et entre les relations
qui existaient entre les maîtres et les femmes esclaves sous l’Islam ?
L’Islam a été honnête avec lui-même et avec les hommes
lorsqu’il a dit : « Ceci s’appelle esclavage. Et celles-là sont des
femmes esclaves. Leur traitement doit obéir à telle et telle directive. »
Mais la civilisation artificielle n’a pas cette honnêteté. Elle n’appelle pas
la prostitution, « esclavage ». Elle la désigne en revanche comme une
« nécessité sociale ».
Et pourquoi
serait-ce une nécessité ?
Parce que l’homme européen civilisé ne veut entretenir
personne, ni femme ni enfants. Il veut seulement prendre son plaisir sans avoir
à assumer de responsabilité. Il veut le corps d’une femme dans laquelle il vide
son trop-plein d’énergie sexuelle. Peu importe qui est cette femme. Peu
importent les sentiments qu’elle a envers lui ni les sentiments qu’il a envers
elle. Lui n’est qu’un corps animal désirant saillir la femelle. Et elle n’est
qu’un corps qui se fait saillir sans avoir le choix non par un mâle en
particulier, mais par le premier venu.
C’est cette « nécessité » sociale qui permet
d’asservir les femmes en Occident à l’ère moderne. C’est pourtant loin d’être
une nécessité si l’homme européen décide de s’élever au rang d’être humain et
refoule tout le pouvoir de son égocentrisme.
Les pays qui ont interdit la prostitution dans
l’Occident civilisé ne l’ont pas fait parce que leur conscience se serait enfin
réveillée, ni parce que leur niveau moral et spirituel se serait élevé
au-dessus du vice. Non pas ! Ils l’ont fait parce que les amatrices ont
permis de se passer des prostituées professionnelles. L’État n’avait donc plus
besoin d’intervenir.
Après tout cela, l’Occident trouve encore suffisamment
de culot pour venir critiquer le système des femmes esclaves en Islam, ce
système qui existait voici mille trois cents ans et qui, tout en étant destiné
à disparaître, était bien plus noble et bien plus sain que le système qui
existe aujourd’hui, au XXe, et que la civilisation moderne considère
comme un système naturel, que personne ne condamne, que personne ne cherche à
modifier, et dont personne ne s’oppose à ce qu’il demeure en vigueur jusqu’à la
fin des temps.
Que nul ne prétende que ces « amatrices »
font leur travail de leur plein gré et qu’elles disposent de leur entière
liberté ! Car ce qui est en cause, c’est ce système qui, à travers la
situation économique, sociale, politique, intellectuelle et spirituelle qu’il
engendre, pousse les gens à accepter l’esclavage ou à y sombrer. Nul doute que
c’est la « civilisation » européenne qui pousse à la prostitution et
qui l’accepte, qu’il s’agisse d’une prostitution institutionnalisée ou qu’elle
soit du fait d’amatrices volontaires.
Telle est l’histoire de l’esclavage en Europe jusqu’à
ce XXe siècle : un esclavage d’hommes, de femmes, de nations et
de races, un esclavage aux sources multiples et sans cesse renouvelées, sans
qu’il existe de nécessité le suggérant, si ce n’est la bassesse avec laquelle
l’Occident s’enfonce en deçà du digne rang de l’espèce humaine.
Ne parlons pas de l’esclavagisme auquel le régime
communiste soumet son peuple, au point que l’individu ne peut même pas choisir
le travail qu’il veut exercer, ni même l’endroit où il veut travailler. Ne
parlons pas non plus de l’esclavagisme auquel les possesseurs de capitaux
soumettent leurs salariés dans l’Occident capitaliste, au point que le salarié
ne peut choisir que le maître qui l’exploitera.
Ne parlons ni de ceux-ci ni de ceux-là. Car l’on
trouvera toujours des polémistes qui viendront en faire l’apologie. Les formes
criantes et indiscutables d’esclavage, que nous avons énumérées, et qui sont
pratiquées au nom de la civilisation et du progrès social, sont suffisantes. À
chacun ensuite d’examiner si l’humanité a progressé en quatorze siècles
d’éloignement de l’Islam ou si elle a poursuivi une inexorable régression
morale, au point qu’aujourd’hui, elle nécessite un flambeau de lumière
islamique qui la fera sortir des ténèbres dans lesquelles elle s’enfonce.
P.-S.
Traduit
de l’arabe du livre de Muhammad Qutb, Shubuhât hawl
Al-Islâm (Controverses sur l’Islam), partiellement disponible en ligne sur le
site Altareekh.com.
Source : http://blog.decouvrirlislam.net
Source : http://blog.decouvrirlislam.net
[3] Ce texte a été rédigé a
une époque où la tentation communiste était très prégnante au Moyen-Orient.
Bien que les temps aient changé, et que du communisme il ne reste que des
fossiles, la question de l’escalavage reste d’actualité et les arguments
demeurent sensiblement les mêmes. Ndlr.
[4] Rapporté avec quelques
variations dans le Musnad de l’Imâm
Ahmad, dans les Sunan des Imâms Abû
Dâwûd, An-Nasâ’î, At-Tirmidhî,
Ibn Mâjah et Ad-Dârimî. Ndlr.
[8] Fragment d’un hadîth
plus long rapporté par Al-Bukhârî,
At-Tirmidhî et Ahmad, selon Abû Dharr — qu’Allâh l’agrée —. Ndlr.
[20]
Il est en effet indispensable de faire une distinction nette entre les
agissements des individus et les enseignements et dispositions prévues par la
religion, afin que les responsabilités soient imputées de manière équitable. Le
rapt des innocents et leur asservissement est très sévèrement condamné par
l’islam, ce qui n’a pas empêché que certains individus commettent ce crime dans
les pays arabes ou musulmans. Ndlr.
SOURCE :
Article pris du dossier :
http://blog.decouvrirlislam.net/Home/dossiers/histoire/esclavage-en-terre-d-islam/l-islam-et-l-esclavage
Mohamed ZEMIRLINE
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