EUROPE
ET MONDE ARABE
LES CROISADES
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« Les croisés massacrèrent partout
les Juifs sur leur passage, sous prétexte que leurs ancêtres avaient mis à mort
Jésus Christ. »
Henri Martin, HISTOIRE DE FRANCE, tome
I, page 166.
« Le
Conseil des chefs Croisés décida que,... on mettrait à mort tous les musulmans
échappés au premier massacre. »
Henri Martin, HISTOIRE DE FRANCE, tome
I, page 170.
« La mise à sac de
Constantinople est sans précédant dans l'Histoire. Durant neuf siècles la
grande cité avait été la capitale de la Civilisation Chrétienne.
Elle était pleine d'oeuvres d'art qui avaient survécu depuis la Grèce antique
et des chefs-d'oeuvre de ses exquis artisans. » Sir Runciman.
*
T A B L E
D E S M A T I E R E S
*
LES CROISADES
a) Sauvagerie et hypocrisie.
Les Croisades furent une gigantesque tenaille dans laquelle fut encerclé l'Islam entre les Croisés d'Occident, et cent ans plus tard, les Mongols venant de l'Est, au secours des premiers. Il n'y eut aucun traité conclu entre Urbain II et le grand-père de Genghis Khan, mais de fait les Mongols furent l'incarnation du mythologique «Prestre Jean» attendu en ces temps par la chrétienté pour «abattre le Dragon musulman». «Prestre Jean» s'incarna en la personne de Hulagu, le petit-fils de Genghis Khan, qui vint au secours des Croisés car il fut jaloux de leurs lauriers lorsqu'il les vit à l'oeuvre. Ces lauriers n'étaient pas très catholiques, ils se voulaient «chrétiens», mais c'était en fait le «christianisme» à la Godefroy de Bouillon et autres Richard Coeur de Lion. Après les massacres commis chemin faisant pour Jérusalem, dont 30.000 Juifs en Rhénanie, ils tuèrent lors de la prise de la Ville Sainte 70.000 Musulmans et Juifs - hommes, femmes, enfants, vieillards - pour ensuite les piller. Comme écrit le chroniqueur Franc de Gesta Francorum qui prit part à la curée, après ce massacre, les Croisés, tout dégoulinants de sang, «allèrent, pleurant de joie, honorer le Tombeau du Seigneur»,
«Les défenseurs s'enfuirent à travers la ville (de
Jérusalem). Les nôtres les poursuivirent jusqu'au Temple de Salomon où il y a
eu un tel bain de sang qu'on y pataugeait jusqu'aux chevilles. Les Croisés
traversèrent la ville en raflant or, argent, chevaux et mulets. Ils pillaient
les maisons pleines de richesses. Après cela, heureux et pleurant de joie,
allèrent, les nôtres, honorer le Tombeau du Seigneur.»(3)
C'est la description de la façon d'«honorer» le Tombeau
du Seigneur, faite par un Croisé lui-même. Un historien allemand du XXe
siècle écrit :
«L'assaut fut donné le 14 juillet 1099. Le jour suivant
Jérusalem tombait aux mains des Chrétiens. La ville fut totalement pillée, et
ce qui s'en suivit fut une vraie boucherie. Tous les infidèles furent tués. Des
monceaux de cadavres entouraient la ville et empestaient encore longtemps
l'atmosphère. Pas même le Trésor de l'Église du Saint Sépulcre fut épargné.»(4)
Il est des historiens qui disent, très graves : «Ne
tombons pas dans l'anachronisme en jugeant les moeurs du XIe siècle
avec ceux du XXe». Cela est vrai. Jugeons les moeurs des Croisés
avec ceux de leur époque mais d'une autre civilisation. Quatre vingt huit ans
après la prise de Jérusalem par les Croisés, consacrée par un carnage, l'Islam
reprend sa ville. Et voilà comment l'historien anglais - plus
sérieux - Steven Runciman fait la comparaison entre les deux civilisations :
«Les
vainqueurs (musulmans) étaient corrects et humains. Là où les Francs 88 ans
auparavant avaient pataugé dans le sang de leurs victimes, pas un seul bâtiment
n'était maintenant pillé, pas une personne molestée. Sur ordre de Saladin des
gardes patrouillaient dans les rues et les portes de la ville pour prévenir
tout outrage contre les chrétiens. Pendant ce temps chaque
chrétien s'efforçait de trouver l'argent nécessaire pour sa
rançon, et Balian (5)
vidait la trésorerie pour rassembler les trente mille dinars promis. C'était
avec difficulté qu'on pouvait faire rendre gorge de leurs richesses aux
Templiers et aux Hospitaliers (6).
Et le Patriarche romain et son Chapitre ne s'occupaient que d'eux-mêmes. Les
musulmans étaient choqués de voir le Patriarche Héraclius payer les dix dinars
de sa rançon et quitter la ville courbé sous le poids de l'or qu'il
transportait, suivi de charrettes chargées de tapis et de vaisselles. Grâce au
reste de la donation de Henri II, sept mille pauvres furent libérés, mais
on aurait pu épargner l'esclavage à plusieurs milliers d'autres si les Ordres
et l'Église avaient été plus généreux. Bientôt deux courants de chrétiens
s'écoulèrent à travers les portes de la ville. L'un, de ceux dont
les rançons avaient été payées par eux-mêmes ou par les efforts de Balian (5).
L'autre courant, celui de ceux qui n'avaient pas pu payer leur rançon et
partaient en captivité. Ce spectacle était si pathétique, qu'Al-Adil (7)
se tournant vers son frère, lui demanda mille captifs en récompense de ses services. Ils lui furent accordés et il les mit aussitôt en
liberté. Le Patriarche Héraclius, enchanté de trouver un moyen si bon marché
pour faire le bien, demanda aussi la faveur de pouvoir libérer quelques
captifs. On lui en accorda sept cents (8),
et cinq cents furent accordés à Balian. Alors Saladin annonça qu'il libèrerait
lui-même tout homme âgé et toute femme. Les dames franques qui avaient payé
leur rançon vinrent lui demander où elles devaient aller maintenant que leurs
pères et maris étaient morts ou captifs. Il répondit en
promettant qu'il libérerait tout mari captif, et donna des cadeaux aux veuves
et aux orphelins de sa propre trésorerie, à chacun selon son rang social. Sa
miséricorde et sa bienveillance étaient en étrange contraste avec les actes des
conquérants chrétiens de la première croisade.»(9)
C'est après avoir lu cela que l'on devient sceptique
concernant ce qui a été écrit sur le «fanatisme des chiens d'Aghar». Ce que
Runciman appelle un «contraste» est le fait que les Croisés trahirent
l'Enseignement du Christ, tandis que Saladin respecta celui de Mahomet :
«Quoi qu'on en ait dit (de Mahomet), l'homme fut bon
et généreux. A la prise de La
Mecque sa clémence fut plus qu'un acte politique.»(10)
Les principes enseignés dans les Évangiles sont aussi
des appels à la bonté, à la générosité et à la clémence, mais les Croisés ne
firent pas des Évangiles ce que Saladin fit du Coran...
L'initiative de la Première Croisade revient au Pape Urbain II, Saint Père de l'Église Catholique Apostolique et Romaine. Il eut pour principal associé le grand patron des Patriarches des Églises d'Orient, l'empereur byzantin Alexis Comnenos. Deux grands politiques, dont la «Raison d'État» en cette circonstance n'eut rien à voir avec le Tombeau du Christ.
Comnenos, aux abois pour son empire en plein effondrement (11), avait besoin des valeureux guerriers Francs pour chasser les Turcs d'Asie Mineure. Les Grecs étaient fatigués de faire la guerre depuis deux mille ans. C'est pour cela qu'ils ne la faisaient plus que par le truchement de mercenaires. Jérusalem était pour Comnenos le moindre de ses soucis. Il était au mieux avec le Khalife du Caire, seigneur de la ville au Tombeau du Seigneur. Il avait envoyé une ambassade à Urbain II pour lui faire miroiter une réunification des Églises «schismatisées» par le «Filioque» (12) si les Occidentaux, en route vers le Tombeau du Seigneur, chassaient les Turcs lors de leur passage à Byzance. La promesse de réunification des deux Églises séparées en 1054 ne pouvait laisser indifférent un Pape de la taille d'Urbain II. Quoiqu'il ne se fiât pas trop aux «levantinades» des Byzantins, il faisait semblant d'y croire, ayant lui-même sa propre Raison d'État qui faisait de la Croisade la solution d'un problème bien terrestre, et fit donc de Comnenos son allié. On a souvent écrit au sujet des Croisés :
«Des hommes aux grands élans idéalistes qui voulaient
organiser un «pèlerinage grandiose du peuple chrétien… une offensive des forces
de toute la chrétienté contre l'Islam», pour «délivrer les Églises d'Orient du
joug des Turcs»... «Une guerre sainte», etc., etc.»(13)
C'est un historien français très
sérieux qui a écrit cela, mais dans un passage de son oeuvre où, pour faire les
beaux yeux à Polymnie (14)
il a fait des infidélités à Clio (15).
La réalité est tout autre.
Concernant les mobiles de l'Occident pour la Croisade, la vérité est sortie de la bouche même du Saint Père lors de son Sermon du 28 Novembre 1093 au Concile de Clermont. Le Souverain Pontife, Urbain II, appela ses guerriers et compatriotes Francs à aller «libérer le Tombeau du Seigneur» des mains de l'«Infidèle». Mais il ne cacha pas en cette circonstance le fond de sa pensée et leur demanda de cesser de s'entrégorger pour s'emparer du Fief du voisin «frère en Jésus Christ», rendant la «Trêve de Dieu» inopérante. Urbain II leur dit :
«Vous
pouvez dans ce pays (en France) à peine nourrir ses habitants. C'est pour cela
que vous épuisez ses biens et provoquez des guerres sans fin entre vous.»
Cela voulait dire : «allez, avec ma bénédiction,
Jean-Sans-Terre, vous emparer, épée en main naturellement, des terres d'autrui
au lieu de vous battre entre vous.»
Comme écrit un historien allemand de la Papauté :
«Espoir
en victoire et butin, et confiance en la félicité éternelle que le représentant
de Saint Pierre leur avait promis.»(16)
Aussi, Sir Steven Runciman, un des plus sérieux
historiens des Croisades, écrit justement :
«Quelles
qu'aient pu être les raisons officielles de la Croisade, le véritable
objectif des Francs était celui de se procurer pour eux-mêmes des Principautés
en Orient.»
BASILE Y.
www.basile-y.com
1/. Henri Martin, HISTOIRE DE FRANCE, tome I, page 166.
2/. Henri Martin, HISTOIRE DE FRANCE, tome I, page 170.
3/. Gesta Francorum, ELEND DES CHRISTENTUMS, J.Kahl, RoRoRo 1968,
4/. J. Haller, PAPSTUM, IDEE UND WIRCKLICHKEIT, RoRoro 1962, tome II,
p. 338.
5/. Commandant en chef de la défense de Jérusalem.
6/. Ordre «religio»-militaire.
7/. Frère de Saladin.
8/. Ainsi, alors qu'il venait de reprendre Jérusalem, le Sultan Saladin
laissa s'en aller le chef spirituel de ses envahisseurs, «courbé sous le poids
de son or», lui faisant même cadeau de 700 chrétiens destinés à la captivité,
sans qu'il ait eu à payer leur rançon, bien que telles aient été les lois de la
guerre d'alors.
10/. Régis Blachère, LE PROBLEME DE MAHOMET, 1952, page 129.
11/. Les Turcs Seldjouks, 24 ans après le désastre qu'ils infligèrent
aux Byzantins à Manzikert, atteignirent les rives du Bosphore.
12/. Les théologiens présentent cette dispute sur le Filioque entre
Rome et Byzance comme une divergence «théologique» sur la procession du Saint
Esprit. Les uns le voulaient procéder, du Père seulement, les autres du Père et
du Fils. En réalité il s'agissait de rivalités entre deux Empires chrétiens. Le
jeune et dynamique Occident voulait dévorer le vieux et décadent Orient au nom
de la «théologie».
13/. L. Bréhier, VIE ET MORT DE BYZANCE, Albin Michel 1969, pages 253 à
255.
14/. Muse de la poésie lyrique.
15/. Muse de l'Histoire.
16/. Johannes Haller, PAPSTUM, IDEE UND WIRKLICHKEIT, 1962, tome II,
page 327.
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LES CROISADES
b) Pierre L'Hermite
Les grands prétendaient avoir des mobiles sacro-saints, des »élans idéalistes», comme rapporte l'historien Louis Bréhier. A côté de ces sentiments élevés des nobles Sirs il y avait ceux de la «canaille» : les pauvres hères que le Propagandiste des Croisades Pierre L'Hermite, dit Chtio Pietre, avait débauchés pour finalement ne les mener qu'à l'abattoir ou à la conversion forcée à l'Islam ! Pierre L'Hermite, qui se prenait pour le Christ parce qu'il voyageait sur un âne, ne méritait pas le nom qu'il s'était donné à cause du manteau d'ermite qu'il portait. L'habit n'a jamais fait le moine, et Pierre L'Hermite n'avait rien d'un ermite : il déserta ses compagnons - ses victimes plutôt - quand la faim régna sur les Croisés à Antioche. 30.000 malheureux qu'il avait débauchés à l'aide de ses complices, les nobles allemands Walter Habenichtse (Gautier-Sans-Avoir), Emich von Leisingen, Gottschalk, Volkmar, etc.
Ce sont ces chevaliers allemands qui déclenchèrent les massacres de Juifs en Rhénanie dans le but de les piller. Pierre l'Hermite et Gautier-Sans-Avoir ne participèrent pas à cette curée, ils étaient partis avec le premier contingent. Tous assurèrent leur subsistance tout au long de leur voyage en pillant. D'abord les chrétiens de Hongrie, pour les remercier de les avoir nourris pendant le temps qu'ils traversaient leur territoire, territoire qu'ils quittèrent en mettant à sac la dernière ville hongroise : SEMLIN. Ce fut ensuite au tour des chrétiens de Serbie, à Belgrade, de faire connaissance avec les «guerriers» de Pierre L'Hermite. Il n'y eut que ceux de Nish qui furent épargnés parce qu'ils réussirent à les repousser en guise «d'hospitalité», informés par la rumeur sur leur qualité de «pèlerins».
Arrivée à Constantinople, la malheureuse cohorte effraya l'Empereur par la qualité de ses «combattants» et leur penchant pour la maraude. Lui qui s'attendait à voir les fameux guerriers Francs, fut bien déçu. Alexis Comnenos s'empressa de leur faire traverser l'eau pour les installer à la forteresse de Civetot en attendant les vrais guerriers, les chefs qui devaient prendre la tête de l'Expédition. Il leur recommanda de s'abstenir de tout pillage ou agression contre les Turcs avant l'arrivée de leurs chefs, et leur fournit des vivres en abondance.
L'«Armée» de Pierre L'Hermite était composée de peu de Francs et de beaucoup de Allemands. Malgré la mise en garde des hommes de l'Empereur, les Francs partirent faire une razzia en territoire seldjouk, aux environ de Nicée, et rentrèrent avec un grand troupeau de bétail pris aux Turcs. Par émulation, les Allemands voulurent faire mieux. Ils partirent attaquer un château au-delà de Nicée, le prirent d'assaut et y trouvèrent un butin très riche. Mais les Seldjouks les assiégèrent à leur tour avant qu'ils pussent s'en aller, et après huit jour les Allemands se rendirent à leurs assaillants. Ceux qui voulurent embrasser l'Islam furent épargnés (ils allaient «libérer le Tombeau du Seigneur» et finissaient par se faire circoncire musulmans...) et le peu qui voulut rester fidèle à sa Foi passa au fil de l'Épée.
Après ce désastre des Allemands les Français partirent les venger, mais tombèrent dans une embuscade. Ils tentèrent de fuir pour retourner à Civetot, avec les Turcs à leurs talons, qui les rattrapèrent au galop avec leur fameuse cavalerie, et les massacrèrent par milliers. De tout le contingent de l'Armée de Pierre L'Hermite il ne resta, que trois mille éclopés qui furent transportés par la marine byzantine à Constantinople où, pendant tous ces malheurs, Pierre L'Hermite s'était prélassé sur la Corne d'Or.
Deux mots maintenant sur la qualité des Croisés que Pierre L'Hermite avait débauchés pour les mener pour partie à la boucherie, et pour partie à la conversion à l'Islam. Qui étaient ces pauvres hères ? Ces malheureux en guenilles. Ces hommes que les chantres des croisades dépeignent comme de fervents croyants, partis «libérer le Tombeau du Seigneur». C'était des pauvres affamés auxquels on avait prêché Jérusalem, «la Ville où coule le lait et le miel». Qui étaient-ils ? Des pauvres paysans faméliques qui erraient pour la plupart en Europe le ventre creux. Deux ans auparavant, deux ans avant le Sermon d'Urbain II à Clermont pour la «libération du Tombeau du Seigneur» il y avait eu la peste et des inondations. L'année suivante, c'est à dire un an avant l'appel du Souverain Pontife aux chrétiens pour partir en guerre contre l'Islam, il y eut la sécheresse et une grande famine. Ce fut le Général «Famine» qui remplit les fonctions de Chef d'État Major de l' »Armée» de Pierre L'Hermite. Dans cette atmosphère de famine, Urbain II éloignait avec son initiative les méfaits de ces calamités non en éliminant les causes, mais en en déplaçant les effets sous d'autres cieux.
BASILE Y.
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LES CROISADES
c) La Croisade des Enfants
Le christianisme germanisé (les Germains ne furent pas simplement christianisés, ils germanisèrent à cette occasion le christianisme) (1) prit souvent à la lettre les passages de l'Ancien Testament (écrits pour d'autres temps) pour justifier des massacres et des conquêtes d' »espace vital» - Hitler est l'inventeur du mot mais pas du fait. Urbain II «donna» aux Croisés les terres arabes en se référant à l'Ancien Testament :
«Lorsque
vous serez entrés dans le pays de Canaan, vous chasserez devant vous tous ses
habitants… et vous vous y établirez ; car je vous ai donné le pays, pour qu'il
soit votre propriété.»(Nombres 33, 52-53)
Un autre Pape, père de César Borgia, son complice dans
tous ses crimes et Saint Père de l'Église Catholique Apostolique et Romaine,
Alexandre VI, a aussi «donné» quatre siècles après Urbain II, les Continents
africain et américain, en les partageant entre Espagnols et Portugais. Fort de
ces précédents, un autre «Pape», Lord Balfour «donna» lui, le 2 novembre 1917,
de nouveau la Palestine
exclusivement aux Juifs, sans se préoccuper des autres Palestiniens.
C'est cette interprétation à la lettre de la Bible Hébraïque (que nous appelons Ancien Testament) qui fut aussi à l'origine de ce qu'on appela en 1212 «La Croisade des Enfants». C'est la traversée de la Mer Rouge par Moïse qu'on voulut faire répéter à des enfants au prix de grands malheurs. Cette malheureuse «croisade des enfants» frisa l'hystérie.
«En
France et en Rhénanie de grandes quantités d'enfants s'assemblèrent autour
d'enfants prédicateurs, qui déclaraient que de tels innocents devraient libérer
Jérusalem par miracle. Arrivés à la côte, ils s'attendirent à ce que la mer
s'ouvre devant eux, afin qu'ils puissent la traverser à sec comme firent jadis
les Israélites. Quand ils virent que la mer ne s'ouvrait pas, la plupart
d'entre eux retournèrent chez eux. Mais nombre d'entre eux étaient morts de ce
qu'ils avaient enduré au cours du voyage. Et il y avait des rumeurs
persistantes que d'autres s'étaient vus offrir des passages gratuits par des
marchands criminels qui les vendirent par cargaison à des esclavagistes
infidèles. Cette hystérie juvénile n'affecta pas la situation militaire
outremer, mais elle continua à donner une mauvaise réputation à la Guerre Sainte parmi
les indifférents !»(2)
Sir
Runciman consacre de son côté, dans le troisième volume de son Histoire des
Croisades (3),
cinq pages entières à cette lamentables histoire de dizaines de mille de
pauvres enfants que l'on envoya à la mort, ou à l'esclavage chez l'Infidèle. Il
y en eut en France qui étaient arrivés à Marseille sous la conduite d'un enfant
(«hysterical boy») nommé Etienne, et deux cohues différentes attirés
d'Allemagne par un enfant nommé Nicholas, qui s'étaient dirigées respectivement
à Pise et à Gènes, pour subir le même sort que ceux de Marseille.
Toutefois,
l'Histoire ne dit pas qui avait soufflé aux «enfants prédicateurs» la légende
de la traversée de la Mer
Rouge et la manière de s'en servir, à une époque
d'analphabétisme.
BASILE Y.
1/. J. Haller, PAPSTUM, IDEE UND WIRCKLICHKEIT, RoRoro 1962, tome II,
pages 326 et suivantes.
2/. Alfred Dugan, THE STORY OF THE CRUSADE, London 1963, page 212.
3/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume III,
pages 140 à 144.
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LES CROISADES
d) Les grands chefs de la première croisade
Raymond
de Toulouse et l'évêque du Puy Adhémar de Monteil ne personnifiaient que
l'Esprit d'une infime minorité des Croisés, sincères dans leur Foi parmi la
masse des nobles chevaliers de la Première Croisade. Adhémar était guidé par la
doctrine augustinienne, Raymond se considérait le bras séculier de cette
doctrine. Les autres, Geoffroy de Bouillon et son frère Baudouin-Sans-Terres,
le Normand de Sicile Bohémond et son neveu Tancred, avaient tous fait le voeu
d'aller jusqu'à Jérusalem «libérer le Tombeau du Seigneur», mais le Tombeau du
Seigneur ne représentait pas plus d'intérêt pour eux que pour l'empereur de
Byzance. C'est pour cela que pour Bohémond
son «voeu» se détourna en cours de route sur Antioche (1), qu'il conquit chemin
faisant vers les lieux Saints, se proclamant «Prince d'Antioche» et s'y
installant définitivement.
Son
neveu Tancred continua la Croisade et devint «Prince
de Galilée», en attendant de se charger plus tard de la Régence d'Antioche, en
l'absence de son oncle Bohémond prisonnier des «Infidèles». De même Baudouin,
frère de Godfroy de Bouillon, son «voeu» le sema aussi en cours de route, en
Mésopotamie où il devint «Comte d'Edesse», en attendant de prendre en 1100 la
place de son défunt frère Godfroy. Il le fit sous le titre de «Baudouin 1er,
Roi de Jérusalem». «Merci mon Dieu» avait-il dû se dire, «Merci d'avoir permis
à un Truand-Sans-Terres de devenir roi d'une ville si fameuse» !
Baudouin et Tancred étaient deux jeunes loups qui n'avaient absolument pas froid aux yeux, ni les moindres scrupules en quoi que ce soit. Leur voracité pour des Fiefs les amena même à faire se battre leurs armées, c'est à dire «Soldats du Christ» contre «Soldats du Christ», pour la possession de la riche ville de Tarse (2). Le plus «beau» fut lorsque trois cents Normands sont venus à cette occasion en renfort pour Tancred contre Baudouin. Ce dernier s'acoquina alors avec les «ennemis de Dieu» Turcs, pour leur faire massacrer ses ennemis personnels pendant leur sommeil, le plus «chrétiennement» du monde. Le résultat fut qu'ils durent s'en aller tous les deux bredouille de Cilicie.
Godfroy de Bouillon alla, lui, jusqu'au bout de son «voeu», parce qu'il fallait la part du lion au descendant de Charlemagne, il lui fallait Jérusalem même. Il en fut le premier roi croisé sous le titre d' «Avocat du Saint Sépulcre». Pour un Monsieur qui tenait son Duché de Loraine par la grâce de l'Empereur Romain Germanique Henri IV - qui pouvait le lui enlever à tout instant - cela avait valu la peine de «prendre la Croix», il n'avait pas perdu au change, les «élans idéalistes» étaient bien payants.
Raymond, comte de Toulouse et Saint-Gilles, marquis de Provence, dut se contenter du Comté de Tripoli après avoir été chassé de Latakia par l'insatiable Bohémond. Ce qui distinguait Raymond de Toulouse des autres Croisés était surtout sa culture provençale qui montrait un fort contraste avec celle des nobles venus du Nord. Ses qualités d'homme loyal et sincère faisaient l'admiration des potentats byzantins. La fille de l'Empereur de Byzance, Anna Comnena, qui le connut personnellement ne tarit pas d'éloges sur lui dans son Alexiade :
«Alexis
(l'empereur) avait une profonde affection pour lui, pour différentes raisons :
l'intelligence supérieure du Comte, sa réputation sans tache, la pureté de sa
vie. Il savait quel grand prix Raymond attachait à la vérité. En somme, de
Saint-Gilles éclipsait tous les Latins, comme le Soleil est plus brillant que
les étoiles.»(3)
De son côté l'évêque du Puy Adhémar de Monteil, Légat du pape pour cette première
Croisade, était aussi un honnête homme, fervent chrétien. C'est grâce à sa
sincère piété et sagesse que furent souvent évitées des confrontations
sanglantes entre chrétiens d'Orient et d'Occident provoquées par l'arrogance
des Croisés.
BASILE Y.
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1/. C'est à Antioche que le mot «chrétien» fut prononce pour la première
fois dans l'Histoire du Christianisme. C'est là que les deux fractions du
Judaïsme se séparèrent en ennemis mortels. Celle des Juifs du Sanhédrin garda
son nom de JUIVE, l'autre branche des Juifs qu'on appelait jusqu'alors la «Secte
des Nazaréens» s'appela, après cette séparation, CHRÉTIENNE, sans abandonner
immédiatement la
Circoncision ; celle-ci devint d'abord facultative et l'est
restée jusqu'à la fin du deuxième siècle.
2/. Patrie de St. Paul, mais ce n'est pas pour cela qu'ils se la
disputaient. C'était parce qu'il y avait de grandes richesses à piller.
3/. THE ALEXIAD OF
ANNA COMNENA, Penguin Classics, 1969, page 330.
*
LES
CROISADES
e) Les «Miracles»
On vivait alors en des temps d'analphabétisme qui rendaient les pseudo «miracles» très aisés. Il est remarquable que depuis la généralisation de notre alphabétisation les faiseurs de «miracles» à la pèle sont en grève... à moins qu'ils ne boudent notre «incroyance» ? Mais en ces temps-là on voyait constamment à la tête de nos armées des Saints montés sur de beaux chevaux blancs (dans le camp adverse c'était Muhammad en personne que l'on voyait également à cheval un peu trop souvent). On voyait également d'autres Saints qui donnaient des conseils lors de ces visions.
Il y eut en particulier un de ces visionnaires, un nommé Pierre Bartholomé qui, comme ça, par hasard «miraculeux», justement au moment où l'on en avait besoin, jouit des faveurs d'une «apparition» céleste. C'était au moment où l'ennemi était menaçant lors du siège d'Antioche et que les Croisés devenus amorphes avaient besoin qu'on leur remonte le moral. Saint André se serait présenté à lui (pourquoi à lui qui était plus truand que les autres), pour lui révéler l'emplacement de la Cathédrale de Saint Pierre où était enterrée la pointe métallique de la lance, avec laquelle un soldat romain, onze siècles auparavant, aurait percé le Corps du Christ crucifié. Ajoutons à cela que la même Lance était gardée au même moment comme Relique à Constantinople. Cela n'a cependant pas empêché nos Croisés de la «trouver» à l'endroit indiqué par «Saint André».
Adhémar, croyant sincère, s'était refusé de faire crédit aux dires de ce «visionnaire». Tout lui paraissait suspect dans cette «apparition» dont l'inspiration terrestre était flagrante de par les buts pratiques du moins qu'elle poursuivait. Tout y était minutieusement inspiré, jusqu'à l'ordre exprès de ne pas s'arrêter à piller le camp ennemi, contrairement aux Us et Coutumes. C'était là une précaution prudente qui avait des raisons stratégiques plutôt que célestes : il fallait pouvoir poursuivre les assiégeants, une fois vaincus ; le pillage aurait été une faute militaire qui aurait gêné les opérations d'anéantissement. Un stratège que ce «Saint André» ! Une autre inspiration télécommandée était l'ordre de faire pénitence pour l'expiation des péchés, avant la sortie contre les assiégeants. C'est qu'on manquait terriblement de vivres ! Kio-Kio Pietre, dit Pierre L'Hermite, avait eu aussi sa petite vision-maison :
«Une
nuit, il crut entendre en songe Jésus Christ lui dire : 'Debout Pierre, et
hâte-toi ! Je serai avec toi ; car il est temps de purger les Lieux
Saints et de secourir mes serviteurs.»(1)
Ce ne fut pas un Saint quelconque qui rendit visite à
Kio-Kio Pietre, ce fut le Christ en personne. Il faudrait beaucoup de place
pour raconter tous ces «miracles». Des «miracles» comme celui où, durant une
bataille en Cilicie, nombreux étaient les combattants qui avaient vu une armée
de «Chevaliers célestes» conduits par St. André, St. Démètre et St. Georges
combattant aux cotés des Croisés, étaient très fréquents. Les Musulmans
n'étaient d'ailleurs pas en reste en matière d'aide céleste : ils ont
souvent vu Muhammad combattre à la tête de leurs armées. Parmi ces miracles il
y en a aussi de véritables : pour les chrétiens, Anatole France a montré
par exemple, dans sa «Vie de Jeanne D'Arc», combien était sincère la Pucelle d'Orléans. Quant à
accorder un crédit à un Kio-Kio Pietre ou à un Bartholomé...
Le «bon Dieu» n'envoya pas des renforts célestes aux croisés seulement contre les «Infidèles». Il fit des «miracles» pour les aider même contre d'autres chrétiens, les «schismatiques de Byzance». Quarante «témoins oculaires» auraient vu l'Ange qui planta la Bannière de Saint Marc des Vénitiens sur la Tour de Galata à Constantinople durant la quatrième croisade, dirigée cette fois-ci exclusivement contre d'autres chrétiens.
BASILE Y.
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1/. Henri Martin, HISTOIRE
DE FRANCE, tome I., page 163.
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LES
CROISADES
f) La Croisade contre d'autres Chrétiens
La Quatrième Croisade fut la Croisade des chrétiens contre d'autres chrétiens. Ce ne fut plus une «guerre sainte» de la Croix contre le Croissant mais d'une Croix contre une autre Croix. C'est le pape Innocent III, inspirateur de la Croisade contre les chrétiens «hérétiques» Albigeois qui prêcha la Quatrième Croisade «contre les Infidèles». En réalité cette croisade fut dirigée par une coalition des Occidentaux avec les Marchands de Venise contre les chrétiens de Byzance, leurs concurrents commerciaux. Elle eut comme prélude le massacre des habitants de la ville hongroise de Zara, dont le pillage eut pour résultat que les coalisés s'entrégorgèrent pour le partage du butin. Il n'y a pas de preuve plus «flagrante» des «grands élans idéalistes» des croisés que cette Quatrième Croisade.
Constantinople fut pour cette Croisade le théâtre de pillages, viols, massacres de chrétiens, incendies volontaires et profanation d'Autels d' Églises chrétiennes, sans précédant dans l'Histoire, comme écrit Sir Runciman. Voici en quels termes cet historien anglais exprime son indignation sur le comportement des croisés à la prise de la chrétienne Constantinople par d'autres chrétiens :
«La mise à sac de
Constantinople est sans précédant dans l'Histoire. Durant neuf siècles la
grande cité avait été la capitale de la Civilisation Chrétienne.
Elle était pleine d'oeuvres d'art qui avaient survécu depuis la Grèce antique et des chefs-d'oeuvre de ses
exquis artisans. Les Vénitiens
savaient apprécier en effet la valeur de ces choses. N'importe où ils le
pouvaient, ils mettaient la main sur les trésors et les amenaient pour orner
les squares, Églises et palais de leur Ville. Les Français et les Flamands
étaient par contre remplis du désir de destruction. Ils se jetaient dans les
rues en foule hurlante. Dans les maisons ils s'emparaient de tout ce qui
étincelait, détruisant tout ce qu'ils ne pouvaient pas amener ; ne faisant
de pause que pour assassiner, enlever des femmes ou défoncer des portes de
caves à vin pour se rafraîchir. Pas plus les Monastères que les Églises ou les
bibliothèques ne furent épargnées. Dans Sainte Sophie même (la célèbre
Basilique) des soldats ivres arrachaient des livres sacrés, des icônes et des
ornements, pour les piétiner. Pendant qu'ils buvaient dans les récipients de
l'Autel, une prostituée s'assit sur le trône du Patriarche pour chanter des
chansons françaises ribaudes. Des Nones étaient enlevées de leurs couvents. On
entrait et détruisait aussi bien les palais que les chaumières. Des femmes et
des enfants blessés gisaient mourant dans les rues. Les pillages et les
effusions de sang durèrent pendant trois jours, jusqu'à ce que la vaste et
jolie ville devint un abattoir. Même les Sarrasins auraient été plus
miséricordieux s'était écrié l'historien Niketas, avec raison.»(1)
Tout cela se passa le lendemain du jour où les croisés
s'emparèrent de la ville et en devinrent les maîtres absolus ; Constantinople avait capitulé sans
conditions. Malgré cela, le Doge Dandolo et les Francs, après s'être déjà
partagé les dépouilles de l'empire byzantin sans se battre entre eux (2),
donnèrent à leur soldatesque le feu vert pour la mise à sac. Ils avaient
pourtant eu toute la nuit pour méditer sur la façon de se comporter envers
leurs frères en Jésus Christ qui gisaient sans défense à leurs pieds :
«Il
n'y eut jamais plus grand crime contre l'Humanité que la Quatrième Croisade.
Elle détruisit et dispersa tous les trésors du passé que Byzance avait entassé
avec dévotion, et blessa mortellement une civilisation qui était encore active
et grande.»(3)
Ce fut cette IVème Croisade des «Chrétiens» qui
anéantit l'Empire Byzantin et non le Sultan Mehmet Fatih, qui, en 1453, ne
donna que le coup de grâce.
Jamais n'exista dans l'Histoire de l'Humanité une
civilisation qui poussa sa soif de pillage au point de profaner ses propres
Temples. L'Homme Blanc n'a-t-il pas mis à feu et à sang ce qui fut sa propre
capitale spirituelle ? De même lorsqu'en 1527 la soldatesque du «Bouclier
de la Santa Fé
Catolica», Charles V, maltraita et mit en prison son Souverain Pontife Clément
VII, viola les Nones et pilla les Églises de la Ville Eternelle ?
Les hommes chargés par la
Couronne d'Espagne de «christianiser» les Indiens n'ont-ils
pas attaqué le 4
Mars 1530, à coup de lance, une procession de l'Église de Mexico
défilant avec des Croix en Deuil et son évêque Fray D. Juan de Zumárraga à sa
tête, pour protester contre les conquistadores de l'Antéchrist qui avaient
prostitué en Amérique leur religion ? Et ces Croisés de la «Guerre Sainte»
de l'Église-Maison de Sa Gracieuse Majesté Britannique, ces Drake, Hawkins et
leurs bandes d'impitoyables pirates qui pillèrent et saccagèrent partout des
Églises catholiques assassinant prêtres, femmes, enfants et vieillards pour
mériter d'être anoblis par leur «Grande Reine Elizabeth» ?
Non, ils n'étaient ni Arabes, ni Mongols, ni Turcs, ni
quelconques Asiates les créatures de l'Homme Blanc qui violèrent les fiancées
du Christ dans leurs couvents à Constantinople. Un de ces Vandales, laissant son
sabre (pour un instant), prit sa plume pour nous décrire lui-même, de sa main
d'assassin, la mentalité et la «morale» de ses compères, ainsi que leur
conception du christianisme occidentalisé (4).
Geoffroi de Villehardouin, Maréchal de Champagne et Romania réunies, un des
acteurs des massacres et mise à sac de Constantinople, à la fin du
chapitre XII de sa Chronique (5),
et après avoir énuméré les résidences que se choisirent les nobles chefs,
écrit :
«le
reste de l'armée s'éparpilla à travers la ville et gagna beaucoup de butin ; de
si grande quantité que personne aurait pu estimer le montant de sa valeur. Il
comprenait de l'or, de l'argent, des services de table, des pierres précieuses,
du satin, de la soie, des manteaux de fourrures d'écureuil, de petit gris et
d'hermine, et tout objet de choix que l'on puisse trouver sur cette terre.
Geoffroi de Villehardouin déclare ici que, à sa connaissance, tant de butin n'a
jamais été gagné en aucune cité depuis la création du monde.
Chacun
prit quartier où il lui avait plu, et il ne manquait pas des fines demeures en
cette ville. Aussi les troupes des Croisés et des Vénitiens étaient installées
comme il faut. Ils s'en réjouirent tous, et remercièrent Notre Seigneur pour
l'honneur et la victoire que leur accorda ; de sorte que ceux qui avaient été
pauvres vivaient maintenant dans la richesse et le luxe. Ils célébrèrent ainsi
les Rameaux et Pâques suivantes avec des coeurs pleins de joie pour les faveurs
dont Notre Seigneur et Sauveur les combla. Et ils peuvent Le louer, puisque
toute leur armée, ne s'élevait pas à plus de vingt mille hommes, et avec Son
aide ils conquirent quatre cents mille et plus ; et cela à la plus grande, la
plus puissante, et la plus solidement fortifiée ville du. monde.»(6)
Et tout cela «avec l'aide de Notre Seigneur et Sauveur».
A quoi bon sans cela devenir chrétien si le Christ ne vous aide pas à tuer pour
pouvoir vivre «dans la richesse et le luxe». Des «Grands Élans Idéalistes»
comme dirait Louis Bréhier.
Le Conquistador Bernal Diaz del Castillo, qui écrivit la Chronique de la prise de
la Gran
Tenotchtitlán, le fit avec plus de pudeur alors que les
Aztèques n'étaient pas ses «frères en Jésus Christ». C'est pour cela que le
chroniqueur byzantin Doucas (à l'occasion du siège de Constantinople en 1453
par le Sultan Mehmet Fatih) écrit :
«Si en ce moment un Ange
était vraiment descendu du Ciel pour annoncer : 'acceptez le réunification des
Églises et je chasserai l'ennemi de la ville', ils n'auraient quand même pas
accepté ; ils auraient préféré être livrés aux Turcs plutôt qu'à l'Église de
Rome.»(7)
Ils ne pouvaient pas accepter de se soumettre à
l'intolérance de Rome envers les «hérétiques» ou «schismatiques», sachant très
bien qu'en Islam on gardait ses traditions et sa liberté de louer Dieu comme on
l'entendait. Au sujet de la tolérance religieuse de l'Islam envers tous ses
sujets, l'historien espagnol Americo CASTRO rappelle ce que fut l'occupation
musulmane de l'Espagne durant huit siècles :
«Coexistence
de chrétiens, maures et juifs ; modèle prestigieux de tolérance islamique.»(8)
Aujourd'hui un théologien anglais confirme le
chroniqueur byzantin Doucas, cité ci-haut, en écrivant au sujet de la prise de
Constantinople en 1455 par les Turcs :
«Ce
n'était pas un changement facile, mais les Turcs le rendirent moins dur
eux-mêmes, car ils traitèrent leurs sujets chrétiens avec une remarquable
générosité. Les mahométans du 15e siècle étaient de loin plus
tolérants envers les chrétiens, que les chrétiens occidentaux l'étaient
entre eux.»(9)
On est en droit de se demander où certains
historiens ont été cherché leurs informations sur les Églises chrétiennes
persécutées par les Turcs, pour justifier les Croisades dites «libératrices».
En préférant «plutôt le Turc que le pape» (10) les Grecs de Byzance, pour une fois dans leur Histoire, ont su faire l'unanimité dans leurs rangs, et ils la firent avec clairvoyance. Les Turcs se comportèrent toujours sur le terrain religieux comme culturel le plus libéralement du monde envers toute sorte de chrétiens ou Juifs. Ce ne fut jamais le cas des Génois, Catalans, Vénitiens ou Francs. Les Turcs étaient particulièrement admirateurs de la culture hellénistique. Le mot turc effendi (11) est un titre de noblesse que l'on donnait à un lettré seulement, à quelque classe sociale qu'il appartienne. Ce mot est dérivé du grec «Aphthendis», seigneur...
Il n'est donc pas étonnant que les chrétiens d'Orient préférèrent vivre plutôt sous la domination turque que sous celle des «Frangui», comme Alexandre Nevski, le père de la patrie russe, avait préféré se soumettre au tribut des Tatars Mahométans plutôt que de se laisser envahir par les Chevaliers de l'Ordre Teutonique Allemand. Un détail additionnel au sujet de ces chevaliers autant affamés d'ESPACE VITAL (notion qui réapparut sous Hitler) que les croisés : ils y allaient avec la bénédiction d'Innocent IV. Car, quoique depuis Innocent III jusqu'à Innocent IV trois papes avaient occupé le Saint Siège, l'écrasement par les armes du christianisme «schismatique» russe restait le complément de la mise à sac précédée de carnage à Constantinople en 1204.
Mais il n'y a pas eu que les Grecs pour préférer les Turcs aux Occidentaux. Il n'y a pas eu qu'Alexandre Nevski pour préférer devenir tributaire des Tatares musulmans, plutôt que de laisser envahir son pays par les Chevaliers allemands envoyés par Innocent IV. Les Chrétiens coptes d'Ethiopie eurent aussi leur choix à faire entre les missionnaires portugais et leurs bonnes relations avec les Arabes. Ils n'hésitèrent pas, heureusement pour eux, à expulser plutôt cette avant garde catéchiste au service du roi marchand d'épices Manuel 1er du Portugal, appelé Le Fortuné pour avoir fait fortune avec les épices que lui amena la soldatesque de Vasco da Gama. L'idole de ces missionnaires et de TOUT l'Occident, Vasco da Gama, fut ce monstre qui, en 1502, fit un ORADOUR-SUR-GLANE flottant (Hitler n'a rien inventé) des occupants d'un navire plein de pèlerins musulmans de retour de La Mecque pour montrer aux «Infidèles» la miséricorde «chrétienne».(12)
Tant les Chrétiens de Russie que ceux de l'Orient, après l'expérience des Croisades, préférèrent toujours avoir affaire aux Musulmans qu'aux «Chrétiens de l'Occident». Runciman en cite des très nombreux exemples :
«Le
Patriarche de Jérusalem écrivait à son collègue de Constantinople : 'Ils (les
Musulmans) sont justes, n'usent pas d'injustice et ne nous font pas violence.'.»
(13)
«En Juin 1104 les habitants Arméniens d'Artah livrèrent leur ville aux Musulmans, enchantés d'échapper à la Tyrannie d'Antioche (Principauté franque de Bohémond).»(14)
«En Juin 1104 les habitants Arméniens d'Artah livrèrent leur ville aux Musulmans, enchantés d'échapper à la Tyrannie d'Antioche (Principauté franque de Bohémond).»(14)
Retombés de nouveau sous la Tyrannie des Occidentaux,
«Ils
(les Chrétiens d'Antioche) se remémoraient avec nostalgie des temps où sous le
juste gouvernement des Musulmans, ils pouvaient exercer leur Culte comme ils
l'entendaient.»(15)
Et résultat du «christianisme» des Occidentaux, à la
cinquième Croisade, deux cents ans après la première,
«Les
nouvelles de Palestine n'étaient pas encourageantes. Jacques de Vitry, qui y
avait été envoyé comme évêque d'Acre, fit une relation amère de ce qu'il y
avait trouvé en arrivant. Les Chrétiens d'Orient haïssaient les Latins et
auraient préféré la domination musulmane.»(16)
BASILE Y.
www.basile-y.com
1/. Steven RUNCIMAN, A
HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome III, page 123.
2/. Il était rare qu'ils ne se battent entre eux pour le partage du butin.
3/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome III, page 130.
4/. «Je me convertirai au christianisme - avait dit leur ancêtre Clovis - si le Dieu des chrétiens m'aide à vaincre mes ennemis»...
5/. Joinville & Villehardouin, CHRONICLES OF THE CRUSADES, Penguin Classics, London 1970, pages 92-93.
6/. Confirmation par témoin oculaire de la relation que fait Runciman sur la conduite des Croisés à Constantinople.
7/. Cité par R.F.Peters, GESCHICHTE DER TÜRKEN, Kohlhamer 1961, page 33.
8/. Americo Castro, LA REALIDAD HISTORICA DE ESPAÑA, Mexico 1966, page 198.
9/. Timote Ware THE ORTHODOXE CHURCH, Penguin Books 1969, page 96.
10/. «Plutôt le Turc que le Pape», c'était aussi le cri des Uilenspiegel aux Pays-Bas.
11/. Hérité de l'Arabe.
12/. Edgar Prestage, THE PORTUGUESE PIONEERS, page 159, dans la traduction allemande chez Goldmann Verlag, titre : DIE PORTUGESISCHEN ENTDECKER.
13/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome I, p.27.
14/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome II, p. 45.
15/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome II, page 465.
16/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome III, page 146.
2/. Il était rare qu'ils ne se battent entre eux pour le partage du butin.
3/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome III, page 130.
4/. «Je me convertirai au christianisme - avait dit leur ancêtre Clovis - si le Dieu des chrétiens m'aide à vaincre mes ennemis»...
5/. Joinville & Villehardouin, CHRONICLES OF THE CRUSADES, Penguin Classics, London 1970, pages 92-93.
6/. Confirmation par témoin oculaire de la relation que fait Runciman sur la conduite des Croisés à Constantinople.
7/. Cité par R.F.Peters, GESCHICHTE DER TÜRKEN, Kohlhamer 1961, page 33.
8/. Americo Castro, LA REALIDAD HISTORICA DE ESPAÑA, Mexico 1966, page 198.
9/. Timote Ware THE ORTHODOXE CHURCH, Penguin Books 1969, page 96.
10/. «Plutôt le Turc que le Pape», c'était aussi le cri des Uilenspiegel aux Pays-Bas.
11/. Hérité de l'Arabe.
12/. Edgar Prestage, THE PORTUGUESE PIONEERS, page 159, dans la traduction allemande chez Goldmann Verlag, titre : DIE PORTUGESISCHEN ENTDECKER.
13/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome I, p.27.
14/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome II, p. 45.
15/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome II, page 465.
16/. Steven RUNCIMAN, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, tome III, page 146.
*
LES
CROISADES
g) Les Mongols
La
tolérance religieuse du monde musulman n'a pas empêché les calomnies de
l'Europe sur le «fanatisme islamique» et sur les «sanguinaires
asiatiques». «Asiates» ! Voilà un mot qui donne le frisson, surtout quand
il s'agit de l'histoire des Mongols racontée aux enfants à l'école (comme on
leur parlait jadis des «fourbes Indiens»). Les tentatives des plus hautes
personnalités de la chrétienté n'ont cependant pas manqué pour faire appel aux
Mongols comme renforts des Croisés contre l'Islam, dès la cinquième Croisade.
En 1220, les Occidentaux, installés depuis 120 ans en Orient, s'adaptaient au mode de vie de la région et commençaient à coexister, en faisant même de bonnes affaires avec leurs voisins. N'était-ce pas d'ailleurs cela la raison de la première croisade ? Le Tombeau du Seigneur fut surtout un prétexte. Sa « libération » ne fut-elle pas en réalité sa profanation par la gente que le Christ avait chassé du Temple avant d'être crucifié ? Mais quoique les Marchands n'en voulaient plus, après la mort du Pape Innocent III, son successeur Honorius III eut des démangeaisons pour une cinquième croisade, qui était vouée à l'échec parce que « On rapporta confidentiellement au nouveau Pape Honorius III que là-bas, en Outremer, personne ne voulait plus d'une nouvelle croisade. Saphadin (1) respectait bien la paix ; de sorte que les marchands aussi bien chrétiens qu'infidèles faisaient bien leurs affaires. »(2)
Et quand les marchands font bien leurs affaires, les
Papes n'ont qu'à s'occuper des leurs, on n'a plus besoin de leurs services,
qu'ils mettent la Tiare
dans le fourreau. Soutiendra-t-on après cela que la «sainteté» des Croisades
n'était pas une autre cause que celle des marchands. Cependant Honorius la
voulait quand même sa petite cinquième croisade. Il comptait sur le concours de
Friedrich II, le grand empereur Romain Germanique. Comme deux concours
valent mieux qu'un pour le succès d'une sainte entreprise, la Providence d'Honorius
allait la pourvoir en la personne des asiates Mongols.
«La
fantaisie superstitieuse des contemporains (d'alors) croyait déjà avoir
découvert le Prêtre-Roi des Indes David-Jean (3)
qui, selon une prophétie largement rependue devrait un jour exterminer les
infidèles. Qu'en réalité c'étaient les Mongols de Gengis Khan…»(4)
Après Honorius III, son troisième successeur
Innocent IV envoya en 1245 une ambassade auprès du Khan mongol Gouyouk à
Karakaroum mais sans succès, tout en lui ayant décerné le titre d'Altesse
Sérénissime. A la bonne volonté d'Innocent IV (5)
de lui faire administrer le baptême, le Khan mongol opposa la présomption, que
le Pape aille en personne à sa Cour en Asie Centrale lui rendre hommage, le
reconnaissant pour son suzerain. Après l'échec de cette ambassade, pas
découragé, Innocent IV envoya en 1247 une deuxième ambassade à Tabris au
général mongol Baichou, qui se termina également par un échec comme la
première.(6)
Au double échec d'Innocent IV vint alors s'ajouter celui de Louis IX (Saint Louis), qui tenta lui aussi en 1249 sa chance de «sauver la chrétienté» en s'alliant aux Mongols de Genghis Khan (7). Pauvre Saint Louis ! Brave roi de France ! Si bon et si juste envers ses sujets ! Il sortit de ses terres pour combattre les «ennemis de Dieu», et il n'y fit que des catastrophes qui contribuèrent pour une large part à effacer complètement de la carte du Proche Orient les royaumes chrétiens qui s'y étaient établis avec la première croisade. Car après 150 ans de séjour (jusqu'à St. Louis) sur ces terres, les Croisés se civilisèrent, en s'intégrant à la région. Ils apprirent en Orient à mêler la diplomatie à la force des armes. Mais Saint Louis y alla comme son père y aurait été, négligeant les conseils des occidentaux «intégrés» à user aussi un peu de «levantinades» comme on appelait l'esprit de compromis et de marchandages qui régnaient en ce coin du monde. Etait-ce de sa faute ? Il était, le pauvre, le fils de Louis VIII, le tueur des «hérétiques» Albigeois, ennemis de Dieu comme les Musulmans - encore un défenseur de Dieu, quoique pas aussi sincère que son fils. Ils voulaient tous défendre Dieu. Quelle folie ! Comme si Dieu n'était pas capable de le faire par ses propres moyens, c'est à dire sans effusion de sang. Il est vrai que si on laissait cette noble tâche à Dieu lui-même comment aurai-t-on pu attacher le Languedoc à la couronne des Capétiens.
La ferveur religieuse de Saint Louis, qui fut sincère, avait été égarée par la mythologie chrétienne du «Prestre Jean» identifiée alors aux Mongols. Elle leur tourna la tête au point qu'il ne pouvait plus voir de «libération» du Tombeau du Seigneur autrement que dans une alliance avec le diable. Le pieu Saint Louis s'était réjoui, le brave homme, des hécatombes du Khan mongol Hulagu, petit-fils de Gengis Khan. Ces hécatombes n'étaient portant pas quelque chose à réjouir le coeur d'un chrétien, même infligées à des Infidèles. Le fait que la femme du féroce Khan, l'épileptique Hulagu, était une chrétienne, suffisait-il à cautionner une telle boucherie ?
Après le passage des Mongols Bagdad, Alep et Damas n'étaient plus qu'amas de ruines fumantes sous lesquelles gisaient des centaines de milliers de cadavres. Après l'acier, ce fut le feu qui compléta l'oeuvre de Hulagu ; et la chrétienté ne se retenait plus de joie à l'annonce de la «bonne nouvelle». La chrétienté et Saint Louis en tête. Tamerlan fit «mieux» 150 ans après. C'étaient là les alliés que l'Homme Blanc se choisit. Que Hulagu ait épargné les chrétiens durant son carnage cela justifiait-il les réjouissances de la chrétienté pour le massacre des Musulmans ?
Après cette collusion Occident-Mongols, quand les Mongols changèrent après Tamerlan pour devenir le peuple le plus inoffensif et le plus pacifique de la terre, c'est là qu'on commença à les dépeindre comme des monstres, en se gardant d'ailleurs bien de parler de Mongols comme Kubilai. Kubilai était le frère du monstre Hulagu. Converti au bouddhisme, il fut le plus humain, le plus généreux, le plus éclairé des conquérants, un conquérant des coeurs. On ne souffle mot sur les Mongols qui développèrent une si brillante civilisation en Inde en arrivant à coexister avec les Hindous tant que les barbares d'Albuquerque n'y avaient pas encore ouvert la voie aux autres barbares de l'Europe pour envahir les Indes.
En réunissant TOUTES les victimes de TOUS les Mongols et en les multipliant par deux, on n'atteindrait pas le chiffre du Quart des victimes de la «Mission Civilisatrice» du SEUL Léopold II de la pieuse Belgique au Congo «Belge». Ceci en faisant grâce des autres flambeaux de notre civilisation ! Cinquante ans après Saladin, sous lequel la générosité le disputait à la tolérance, Saint Louis voulait s'allier aux «sanguinaires Mongols» contre les descendants de l'«Antéchrist», comme on avait appelé le grand Sultan Saladin. Aujourd'hui tous les historiens sont d'accord pour reconnaître en Saladin le plus humain et le plus chevaleresque des hommes. On a lu au paragraphe «Sauvagerie et hypocrisie» comment Sir Runciman fait la comparaison entre la Boucherie - présidée par le prestigieux descendant de Charlemagne Godefroy de Bouillon - commise par les Croisés à la prise de Jérusalem, et sa reconquête par Saladin 88 ans après, présidée cette fois-ci par la miséricorde envers les vaincus.
Il suffit de rapporter ici deux anecdotes historiques sur Saladin pour juger le soit disant «Antéchrist» des champions occidentaux de la calomnie.
En 1182 il assiégait le Château de Kerak
de son ennemi juré - parce que c'était un faux jeton - Reynald de Châtillon. On
célébrait ce jour là les noces de la Princesse Isabelle
avec Humphrey IV, seigneur de Toron. Dame Stéphanie, mère du fiancé,
connaissant le caractère chevaleresque de Saladin, lui fit porter des plats du
festin dont elle avait dirigé la préparation. Touché de ce geste, Saladin fit
demander en quelle Tour du Château les nouveaux mariés allaient prendre
demeure, et donna des ordres pour qu'elle ne fût pas bombardée. Ce n'est pas là
un conte des Mille Et Une Nuit, c'est de l'histoire vraie rapportée par Sir
Runciman (8).
Il y a une autre anecdote historique sur
Saladin rapportée également par Steven Runciman, malheureusement pas aussi
heureuse que la précédente. Reynald de Châtillon appartenait à cette catégorie
de fourbes qui donnent leur parole pour la reprendre quand ils en ont besoin.
Il avait déjà trahi maintes fois Saladin, et Saladin haïssait les hommes sans
honneur. Cinq ans après les politesses déjà décrites avec Dame Stéphanie, le Maître
du Château de Kerak tombe prisonnier de Saladin avec d'autres croisés, dans une
bataille livrée suite à une nouvelle trahison de Reynald de Châtillon. On amène
les prisonniers, dont le roi de Jérusalem Guy de Lussignan, sous la tente de
Saladin, mourants de soif. Le Sultan d'Égypte fait servir aussitôt à boire de
l'eau rafraîchie avec de la neige en commençant par Guy de Lussignan. Celui-ci,
désaltéré, veut passer la coupe à Châtillon. Saladin l'en empêche. Les lois de
l'hospitalité islamique héritées des Arabes font d'un homme auquel on a donné
l'hospitalité ne serait-ce que d'un verre d'eau - surtout d'un verre d'eau - un
hôte, c'est à dire un homme envoyé par Allah pour le mettre sous la protection
du donneur de l'hospitalité. Si Saladin avait laissé Reynald de Châtillon boire
dans sa coupe, Reynald devenait son protégé. Mais Saladin s'était depuis
longtemps juré de lui trancher la tête de sa propre main ; et foi de
Saladin, il fallait tenir parole en le maudissant comme traître et brigand.
Pour qu'un homme comme Saladin, toujours prêt aux compromis et aux réconciliations - il n'avait pas été théologien dans sa jeunesse pour rien - en soit amené là il fallait que le seigneur de Kerak fusse un triste sire. Cet esprit de compromis qui présidait toujours à sa politique, Saladin le témoigna même envers la terrible secte des Assassins (les Hachechin) ismaélites, ses adversaires, qui avaient projeté de l'assassiner. Quand il trouva un poignard empoisonné sous son oreiller en avertissement, il ne trancha pas la tête de ses gardes du corps, il ne fit pas d'hécatombes des tenants de la secte, mais entama des négociations avec eux, leur fit quelques concessions, et ceux-ci le laissèrent tranquille dorénavant.
Après quelques années d'«hospitalité», Saladin libèra le roi de Jérusalem Guy de Lussignan à la seule condition qu'il lui promette de ne jamais plus porter les armes contre l'Islam - Saladin avait souvent libéré des croisés prisonniers sur une simple supplique épistolaire de leurs épouses - le roi Guy donna sa parole, mais, foi de croisé, il la reprit quelque temps après pour assiéger Acre tenue par les Musulmans.
La même Morale «chrétienne» guida le fameux Richard Coeur de Lion (pourquoi pas de Tigre ?), lorsque pour faire capituler Acre il promit la vie sauve à ses habitants s'ils se rendaient. Quand ils se rendirent, foi de Croisé, ils passèrent tous au fil de l'épée.
Reynald de Châtillon, Guy de Lussignan, Richard Coeur de Lion n'étaient pas des exceptions à la règle. Au contraire, c'étaient les Raymond de Toulouse et Adhémar de Monteil qui l'étaient.
Le chevaleresque Sultan Saladin,
respectueux du testament d'Abou Bakr, était si miséricordieux envers les
vaincus, qu'après sa mort il y eut des familles franques qui prénommèrent leurs
enfants comme lui en gratitude pour la façon généreuse dont il avait traité
leurs ancêtres vaincus, par lui, l' «Antéchrist».
Non, les Croisades n'ont pas été un fait d' »élans idéalistes» de la chrétienté comme quelques hommes sérieux le prétendent parfois. Elles ont été avant tout une entreprise de brigandage inspirée par le «bébé» société marchande encore dans les langes. C'était là un avant-coureur de ce qui attendait l'Humanité à la majorité du maudit «bébé», DU coupable !
BASILE Y.
www.basile-y.com
1/. Frère et
successeur du Sultan Saladin.
2/. Alfred Dugan, THE STORY OF THE CRUSADE, London 1963, p. 213.
3/. Le fameux «Prestre Jean».
4/. J. Haller, PAPSTUM, IDEE UND WIRCKLICHKEIT, RoRoro 1962, tome IV, page 22.
5/. Innocent IV était la Mascotte des Chevaliers Teutons qu'il avait envoyés contre les Chrétiens de Russie, faisant ainsi le jeu des Tatares musulmans, auxquels Alexandre Nevski avait affaire à l'Est de ses frontières. Mongols au secours des Croisés, Tatares musulmans au secours des Chevaliers Teutons : en pleine stratégie césaropapiste.
6/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume III, p. 259.
7/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume III, page 260.
8/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume II, pages 440-441.
2/. Alfred Dugan, THE STORY OF THE CRUSADE, London 1963, p. 213.
3/. Le fameux «Prestre Jean».
4/. J. Haller, PAPSTUM, IDEE UND WIRCKLICHKEIT, RoRoro 1962, tome IV, page 22.
5/. Innocent IV était la Mascotte des Chevaliers Teutons qu'il avait envoyés contre les Chrétiens de Russie, faisant ainsi le jeu des Tatares musulmans, auxquels Alexandre Nevski avait affaire à l'Est de ses frontières. Mongols au secours des Croisés, Tatares musulmans au secours des Chevaliers Teutons : en pleine stratégie césaropapiste.
6/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume III, p. 259.
7/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume III, page 260.
8/. Steven Runcimen, A HISTORIY OF THE CRUSADES, 1968, volume II, pages 440-441.
*
LES CROISADES
h) Le Coupable
Pas plus l'Église de Rome que l'empereur de Byzance ne sont les vrais coupables des crimes des Croisés. Le vrai coupable fut une certaine classe sociale, le bébé société marchande encore dans les langes qui, après un long séjour dans le ventre de sa mère la société féodale, commença aux environs du XIe siècle à sortir de ses entrailles.
Cette société marchande eut pourtant régulièrement de grands idéaux. L'année où les Croisés pataugèrent dans le sang de leurs victimes dans le Temple de Salomon, Abélard avait vingt ans. Ce grand homme, qui n'est malheureusement honoré que pour ses amours avec Héloïse, était bien plus. Avec son disciple le moine Arnaud de Brescia, ils annonçaient une ère nouvelle, l'ère d'une société marchande occidentale destinée à développer un monde industriel, qui malheureusement éleva les tueries et massacres du genre humain de leur niveau artisanal à celui de Hiroshima-Nagasaki. Le capitalisme avait pourtant déjà existé dans l'antiquité chez de nombreux peuple de la terre avec sa société marchande du «Doit et Avoir». On appelle ce capitalisme «primitif» parce que nous appelons «primitif» tout ce qui n'est pas à notre image. Le féodalisme mit un temps d'arrêt au développement de cette sorte de capitalisme. Mais quand la société marchande, vestige de l'antiquité, qui avait survécu somnolente au sein de la société féodale grâce aux Juifs commença à rendre l'européen non-juif envieux de ses compatriotes Juifs, c'est alors qu'on commença à patauger dans le sang des «Déicides» et des «Infidèles», pour commencer, et des Amérindiens et des Africains ensuite.
Les Juifs avaient été les intermédiaires entre le Proche Orient et l'Occident ; les Musulmans entre l'Orient et les Juifs de l'Europe. Comme toute entreprise commerciale qui se respecte a intérêt à supprimer les intermédiaires, Juifs et Musulmans (comme Carthage chez les Romains) devaient disparaître des avenues des échanges commerciaux des européens. Certes, les chevaliers féodaux aux lourdes armures n'étaient pas des marchands ; l'Église était d'ailleurs l'ennemie la plus farouche de la classe marchande naissante :
«En
Italie centrale et à Rome s'annonçaient des temps nouveaux lorsque Arnaud de
Brescia renouvela la
République Romaine…
«Grégoire VII (1) et ses Légats étaient conscients du danger que représentait pour leur système la bourgeoisie ascendante. A côté des États en voie de centralisation, la bourgeoisie des grandes villes était devenue un des facteurs politiques qui préparait la fin du moyen âge.»(2)
La «bourgeoisie» ne régnait pas encore, loin de là !
C'étaient L'Église et le féodalisme qui régnaient, mais l'A r g e n t
avait déjà commencer à gouverner toutes les actions des Princes
régnants. L'odeur des épices et autres raffinements de l'Orient (monopole
jusqu'alors des Juifs et des Arabes) commençait à flatter les narines rustres
de l'Europe plus fort que ne l'avait fait jusque-là l'encens pour le Seigneur.
Lorsque le moine réformateur Arnaud de Brescia releva le drapeau de la «Pataria»
en déclin, pour partir en guerre contre la corruption et la simonie qui
régnaient au sein de l'Église, il était le porte-drapeau des guenilleux
qu'était encore la classe marchande naissante. Il voulait fonder une «République
Romaine» pour rendre l'Église digne des traditions apostoliques au service des
pauvres, qu'elle avait abandonné lorsqu'elle déménagea des catacombes vers des
palais épiscopaux. Arnaud voulait partager les biens de l'Église entre les
pauvres qui végétaient dans la misère face au luxe insolent des hauts Prélats
et la bonne vie du clergé en général.
Arnaud de Brescia était un homme du peuple. Le cerveau pensant, le philosophe qui l'inspirait fut celui qui ne fut pas que l'amant d'Héloïse(3), mais aussi celui de la liberté de penser. Le moine Arnaud était le disciple d'Abélard, c'est pour cela que Saint Bernard de Clairvaux les dénonça tous les deux à Rome comme :
«L'abeille
de France siffla l'abeille italienne, et ensemble se lancèrent contre le
Seigneur et contre Son Christ.»(4)
En réalité le «Christ» c'était les biens féodaux de
l'Église. Toutefois la dénonciation de St. Bernard n'eut pas d'effet immédiat.
Mais il eut quand même son petit Bûcher, Saint Bernard, quoiqu'il n'ait pas
joui du spectacle pieux de son vivant. Abélard et Arnaud de Brescia furent
condamnés en 1140, au Concile de Sens ; Abélard échappa au supplice en
abjurant ses «erreurs» (comme Galilée). Arnaud, lui, subit le sort «miséricordieux»
des «hérétiques». On mit fin ainsi à son action de Tribun révolutionnaire au
service des pauvres, des petits artisans (devenus quelques siècles plus tard
les grands industriels dévoreurs d'hommes), du menu peuple, en un mot de la
classe marchande naissante, contre les seigneurs féodaux et une Église dont Saint
Bernard était l'avocat d'affaires en la confondant avec le «Seigneur et Son
Christ''.
Il n'y a pourtant aucune contradiction entre Saint Bernard défendant les richesses de l'Église contre la classe marchande naissante et Saint Bernard prêchant la deuxième croisade afin d'envoyer ses chevaliers féodaux contre l' »Infidèle», et ouvrir ainsi la porte du commerce avec l'Orient au profit de la classe marchande. L'Allemagne impériale a bien fait l'erreur de transporter Lénine en wagon plombé de Suisse en Russie à travers son territoire, alors que celui-ci donna plus tard le premier assaut conséquent de l'Histoire contre son propre régime.
La classe marchande d'Arnaud était naissante. Elle était sympathique à ses débuts. Quel est le bébé qui n'est pas sympathique ? Napoléon, Hitler et Staline l'étaient certainement aussi dans les langes. Qui aurait pensé, en voyant leurs petites frimousses au berceau, qu'un jour ils deviendraient des monstres ?
Abélard était un grand seigneur de la pensée, un philosophe libéral dirait-on aujourd'hui, ayant des sympathies pour le peuple. Arnaud, lui, était LE peuple. L'honnête moine réformateur, qui voulut re-christianiser une Église qui s'était éloignée du Christ, et fut le premier héros de la classe marchande occidentale. Cette classe était encore trop faible pour sauver son héros des griffes de ses ennemis, et le laissa périr en martyr. Il n'en fut pas de même d'un autre moine réformateur à son service, qu'elle arracha des griffes de ses bourreaux parce qu'elle avait atteint alors l' »adolescence». C'est ainsi que Luther fut sauvé du Bûcher (auquel le destinait l'Église) à la joie des marchands de Worms, de Hambourg et d'ailleurs, et pour le malheur des Juifs, et de la philosophie allemande qu'il infesta d'antisémitisme, «Phénomène bourgeois» (J.-P. Sartre).
Luther fut sauvé mais son disciple Thomas Münzer, abandonné par son Maître, n'échappa pas à la décapitation. Il avait commis le «crime» lèse-bourgeoisie d'être le protestant des petits, au contraire de son Maître, protestant des grands, qui se détourna de son disciple resté fidèle aux pauvres.
Comme le réformateur Arnaud de Brescia donna sa vie au service de l'embryon de la bourgeoisie lombarde des petites gens des villes, le réformateur Th. Münzer donna la sienne au service d'un embryon de la bourgeoisie allemande : les paysans pauvres. Des trois «contestataires» seul Luther s'en tira, car lui seul méritait de vivre aux yeux d'une bourgeoisie qui avait atteint sa majorité.
Quoi qu'il en soit, les Croisades, oeuvre du seul dieu de la Bourgeoisie, le Veau d'Or, furent le baptême de feu des européens pour les pillages et massacres qu'ils commirent pendant plusieurs siècles à l'échelle planétaire lors de leur colonialisme.
BASILE Y.
www.basile-y.com
1/. Mort dix ans avant
le prêche de la première croisade par Urbain II.
2/. Albert Brackmann, DIE URSACHEN DER GEISTIGEN UND POLITISCHEN WANDLUNGEN EUROPAS ; Darmstadt 1958, pages 42 et 43.
3/. C'est pour cela que des amoureux fleurissent encore aujourd'hui au Père-Lachaise la tombe d'Abélard et d'Héloïse. Personne ne pense plus à Arnaud, supplicié pour avoir mis dans les actes les théories de son Maître Abélard.
4/. Cité par B. Dunham, THE HERETICS, London 1965, page 180.
2/. Albert Brackmann, DIE URSACHEN DER GEISTIGEN UND POLITISCHEN WANDLUNGEN EUROPAS ; Darmstadt 1958, pages 42 et 43.
3/. C'est pour cela que des amoureux fleurissent encore aujourd'hui au Père-Lachaise la tombe d'Abélard et d'Héloïse. Personne ne pense plus à Arnaud, supplicié pour avoir mis dans les actes les théories de son Maître Abélard.
4/. Cité par B. Dunham, THE HERETICS, London 1965, page 180.
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LES
CROISADES
i) La fin des Croisades
Aux XIIe et XIIIe siècles les Croisades coûtèrent beaucoup de sang aux Arabes (musulmans et chrétiens), aux Juifs d'Europe et du Proche Orient, aux Chrétiens de Hongrie et de Serbie par les hordes de Pierre l'Hermite, enfin aux Chrétiens de Byzance par la Quatrième Croisade organisée par le pape Innocent III et le Doge de Venise. On ne peut pas dire que toutes ces Croisades furent pour rien. Ce sang ne fut pas perdu pour tout le monde. Il fut le premier tribut pour le développement de l'Europe, qui précéda le tribut du sang des Amérindiens, des Africains, des Asiatiques et autres peuples qui jouirent des bienfaits de notre «Mission Civilisatrice».
Après le XIIIe siècle les Croisades n'intéressaient plus LE Coupable. Il faisait de bonnes affaires avec les «ennemis de Dieu» - un Dieu qui n'était pas son Veau d'Or - au bassin de la Méditerranée, les Croisades n'avaient plus de raison d'être. Malgré les bonnes affaires le Requin trouva que ce bassin était devenu trop étroit pour ses nageoires et son appétit. C'est à l'échelle planétaire qu'il commença à étendre ses ambitions à partir de la fin du XVe siècle. La dernière Croisades fut le lamentable échec du «Don Quichotte» Pie II qui, avec trois siècles de retard, la voulut absolument, lubie de toute sa vie avant d'être Pape. Il croyait qu'il suffisait d'être Pape pour décider de l'opportunité d'une Croisade, sans la bénédiction de la Bourgeoisie. Échec parce que tous les rois de la chrétienté qui régnaient en ces temps (alors que c'était l'ARGENT qui gouvernait leurs États) ne lui firent que des promesses non-tenues, le laissant tomber avec sa marotte. La bourgeoisie avait alors d'autres chats à fouetter que la lubie de Pie II. C'était l'ère des grandes expéditions de brigandage qui commençait en cette fin du XVe siècle.
Après les marchands d'épices du Portugal qui financèrent l'expédition de Vasco da Gama (Manuel le Fortuné régnait au Portugal, mais ils gouvernaient) ce fut le grand bourgeois espagnol de Santangel et les moins grands bourgeois, les frères Pinzón (los Pinzones) qui financèrent l'expédition de Christophe Colomb. La légende raconte qu'Isabel la Catholique mit ses bijoux en gage chez des «usuriers juifs» pour financer cette expédition, mais la vérité historique nous apprend que c'est la bourgeoisie espagnole qui la finança à 100%. Luis de Santangel les 2/3, avec 1.000.000 de maravédis(1), et «los Pinzones», armateurs de Palos, l'autre tiers, avec 500.000 maravédis.
C'est alors que commencèrent les grandes expéditions des pillards de l'Occident. Christophe Colomb et Vasco da Gama en ouvrirent la voie, le premier inaugurant personnellement la mise en esclavage des Indiens le deuxième donnant l'exemple des massacres en masse, avec son Oradour-sur-Glane flottant (voir «La Croisade contre d'autres Chrétiens»). Les Portugais, suivis par les Hollandais pour commencer, et par les autres européens par la suite, allèrent porter la désolation jusqu'en Indonésie. Ce fut toute l'Europe qui se rua vers les Amériques, sur les pas des Ibériques. Au XIXe siècle commença une ère nouvelle de pillages avec Napoléon, qui ouvrit la voie aux Jules Ferry de tout l'Occident. Alors commencèrent des Croisades sans Croix. C'était démodé la Croix. Il fallait être de son temps. Depuis le Siècle des Lumières on était devenu «porteurs de Lumières» avec le général Bugeaud de la Piconnerie, Sir Cecil Rhodes, Lord Kitchener, le général Gallieni. Ils se couvrirent de gloire avec des épées contre des corps nus ou des mousquetons contre des flèches. Leurs noms sont inscrits en lettres d'or au Panthéon des héros de l'Europe. L'Entente Cordiale se scella ainsi dans la rivalité pour les rapines et l'émulation dans le meurtre. L' «AUTRE» était en retard pour la Curée. Comme les appelle Han Su Yin : Guillaume II, LE RETARDATAIRE EN PILLAGES(2). Quant au plus vorace de tous, il tua tellement de Peaux-Rouges que ça lui faisait mal à la main. Alors il inventa le néo-colonialisme pour donner des leçons de «Morale» aux colonialistes européens. Le Big Stick de ses Théodore Roosevelt était réservé aux cas exceptionnels, pour les cas où les investissements et la «sécurité» de ses nationaux étaient «menacés».
La guerre d'Algérie ne commença pas en 1830 avec l'arrivée des Français qui venaient après tout, officiellement du moins, en représailles contre un satrape de l'Empire Ottoman oppresseur des Algériens. L'Empire Ottoman avait déjà persécuté Abd El Kader et son père Muhyi al Din. La guerre d'Algérie commença avec les massacres sadiques du Duc de Rovigo dont on voulut perpétuer la mémoire en donnant son nom à une bourgade d'Algérie. Abd El Kader ne voulait pas chasser les Français de toute l'Algérie. Il voulait au contraire coexister, comme il écrivit alors au roi de la Bourgeoisie française Louis Philippe. Mais la Bourgeoisie française lui répondit par des renforts militaires.
Après les succès de l'Entente Cordiale en 1914-18 contre les «retardataires en pillage», il fallait se partager les dépouilles de l'Empire Ottoman écroulé. On inventa une «Société des Nations» encore dominée par l'Occident (avec le «bâton de pèlerin» d'Aristide Briand) pour le charger du partage des dépouilles du Sultan d'Istanbul. La France eut ses «Mandats», l'Angleterre les siens. Le sang versé pendant la Première Guerre Mondiale ne le fut pas pour rien, en tout cas pas pour tout le monde. LE Coupable en tira largement profit. Les politiciens à son service ne manquèrent pas.
En fin de compte la France, si riche en éminents orientalistes, au lieu de demander leur conseil sur la politique à suivre envers les populations du Proche Orient, à peine libérées du joug ottoman et soumises à son «Mandat», elle y envoya des traîneurs de sabre à la Weygand, et Serrail qui, lui, y représenta la France en faisant bombarder le quartier musulman de Damas par les Airs et l'Artillerie.
L'autre Aile de l'Entente Cordiale a fait «mieux». Au lieu de se salir dans des «sales guerres», elle usa de la roublardise avec le Divide and Rule (diviser pour régner) et un Intelligence Service plus malin que les héritiers du 2e Bureau. L'autre Aile a fait battre les «coloured» partout entre eux en vendant des armes aux deux camps, comme avait fait la Mésentente Cordiale au XVIIIe siècle en faisant battre Algonquins contre Iroquois et vice versa.
BASILE Y.
www.basile-y.com
1/. Le «Nouveau Chrétien» (Juif converti à la Santa Fé Catolica) Luis
de Santangel était 1'ALMOJARIFE (Ministre des Finances) des Rois Catholiques.
Il déposa aux pieds de la
Reine Isabelle La Catholique un million de Maravédis de sa fortune
personnelle, en «la suppliant de ne pas lui faire l'affront de lui proposer des
gages», écrit Pater LAS CASAS dans son HISTORIA DE LAS INDIAS, éditions F. de
C.E., Mexico 1951, page 170.
2/. Han Su Yin, THE CRIPPLED TREE, éditions Jonathan Cape, Londres
1970, page 111.
Textes
de :
BASILE Y.
www.basile-y.com
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Mohamed ZEMIRLINE
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